Les jours heureux ne s’oublient pas


Les jours heureux ne s’oublient pas
de Gavin’s Clemente Ruiz
198 pages, éditions Albin Michel, à 18,90€


Résumé : Lorsqu’il débarque en Espagne, où son père est censé avoir refait sa vie, Gontran découvre un veuf esseulé, écrasé par le poids des souvenirs et du chagrin. Le fils décide d’aider le père. Mais comment le soutenir et combler le vide laissé par la femme qui rendait à l’un et à l’autre la vie si extraordinaire ?


Extraits : « Ma mère a eu la mauvaise idée de mourir un jour d’été. Depuis, c’est l’hiver toute l’année. »

« On passe à table comme on se lave les dents. Une corvée comme une autre. »


Mon avis : Gontran, 39 ans, est marié à une femme formidable avec qui il a un adolescent de 15 ans. Sa mère est décédé quelques années auparavant, laissant son père, veuf, seul et éploré. Ce dernier a rapidement refait sa vie avec Victoire, avec qui il est parti vivre en Espagne, décision motivée par le fait de tourner rapidement la page d’une grande partie de sa vie. Mais Victoire s’inquiète de l’état de santé physique et moral de son compagnon et appelle son fils à la rescousse. Gontran prend l’avion pour rejoindre son père et le découvre affaiblit, voire carrément dépressif. Il se rend compte que ce dernier n’a pas fait le deuil de sa femme et qu’il est en proie aux souvenirs incessants, aux remords et chagrins continuels.

Gavin’s Clemente Ruiz ne vire pas dans le pathos, puisqu’il n’écrit pas un récit larmoyant pour faire pleurer dans les chaumières. Bien au contraire, Les jours heureux ne s’oublient pas est lumineux, tendre, plein d’espoir et de moments de bonheur, avec des scènes remplies d’humour.

La relation qui lie Gontran à son père est particulière ; certains peuvent s’y identifier, au contraire d’autres personnes. Tous les deux sont assez pudiques vis-à-vis de leurs sentiments : ils n’ouvrent pas leurs cœurs, mais se contentent de faits et gestes plutôt que de paroles directes. C’est assez touchant de voir ces deux hommes, qui se sont séparés avec les années et l’éloignement géographique, se retrouver ensemble, puis se redécouvrir. Gontran apprend à connaître des facettes de son père qu’il ignorait jusqu’alors et dont il n’aurait jamais soupçonné l’existence. Ils se montrent plus attentionnés l’un envers l’autre, jusqu’à débloquer le canal des souvenirs et des secrets inavoués. Gontran va alors découvrir tout un pan de l’histoire d’amour de ses parents qu’il ignorait totalement, partagé entre incrédulité et stupeur. C’est à partir de cet instant qu’il va comprendre qu’il ne connaissait ses parents qu’à travers ce qu’ils lui donnaient à voir et pas réellement tels qu’ils étaient. C’est souvent le fait des connaissances que nous côtoyons dans notre quotidien, que nous pensons connaître, sans pour autant soupçonner un seul instant la partie de l’iceberg immergée, bien enfouie et camouflée derrière des couches épaisses de non-dits.

C’est un livre sur la famille, sur les secrets et les non-dits, mais aussi sur l’amour familial, les sentiments, la mort, le deuil et les souvenirs qui nous restent. Le plus dur étant de continuer à vivre après la perte d’un être cher, de poursuivre sa vie alors que chaque minute du quotidien est hanté par les souvenirs des moments heureux passés avec cette personne. Une terrible épreuve que vit le père de Gontran depuis plusieurs années, qui n’arrive pas à se départir des souvenirs de sa femme ni à se séparer des biens matériels qui la relie à elle. S’en séparer reviendrait à tirer un trait définitif sur son existence puis à l’effacer progressivement de sa mémoire, d’où la difficulté à passer à l’acte. Mais vivre continuellement dans le passé n’aide pas non plus pour avancer dans l’avenir et se reconstruire. Un dilemme titanesque, qu’il faut pouvoir combattre par soi-même.

La présence de Gontran va aider son père à tourner définitivement la page de sa vie passée pour en écrire de nouvelles, toujours aussi belles. A 39 ans, Gontran se rend compte que les rôles sont maintenant inversés, puisque c’est à son tour de prendre soin de son père, comme son père a pris soin de lui quand il était enfant. Une relation parent-enfant que questionne l’auteur avec sensibilité et humanité.  


Un roman attendrissant qui exploite la relation père-fils et les difficultés qui émanent de cet amour familial. Une lecture qui fait du bien, qui traite d’un sujet triste, le deuil, avec un mélange de douceur, d’émotions et d’humour.

Ma note : 7,5/10

Pour lire plus d’avis :
     

ISBN : ‎ 978-2-226-47418-6

2 réflexions sur “Les jours heureux ne s’oublient pas

Laisser un commentaire