Debout sur la terre


Debout sur la terre de Nahal Tajadod
503 pages, éditions Zulma, à 12,50€


Résumé : Il y a d’abord un père merveilleux, khan de vastes terres du Nord, grandes de leurs trois mille âmes. Il voit soudain le voile des femmes tomber, les temps changer, bouleversant toutes les moeurs. Il y a sa fille, Ensiyeh, élevée comme un garçon, qui se bat pour son domaine et s’habille pourtant comme une héroïne de Tchekhov. Il y a Fereydoun, séducteur et fantasque, qui aime Ensiyeh et esquive avec grâce les folies des hommes et du pouvoir. Il y a Monsieur V., qui a connu la gloire et les grands hommes au service des Pahlavi et qui sera emporté par les tourments de Téhéran… Il y a la mort de la monarchie, les tourbillons de la révolution… Mais il y a surtout l’Iran – de l’Empire perse à la Révolution -, personnage central de ce roman foisonnant, parfois comique, avec les surprises prodigieuses de son histoire et la fin d’un monde qui se croyait immuable.


Extraits : « Sois forte et n’oublie jamais d’où vient ta force. N’oublie pas, ma fille : aucun homme fort ne pourra jamais affronter une femme forte. »

« Ensiyeh avait voulu la gifler. Mais elle s’était retenue. Un général, sur le front, ne frappe jamais les parasites, les écumeurs de deuil. »


Mon avis : Debout sur la terre est un récit d’histoire romancée de l’Iran au milieu et à la fin du XXème siècle. On suit plusieurs personnages, qui se croisent, s’entrecroisent et changent au fil du récit. Il y a d’abord Fereydoun, un réalisateur de télévision séducteur et mystérieux, qui se rend chez un certain Monsieur V., deuxième personnage important, pour adapter sa biographie de Victor Hugo à la télévision. Ce dernier, intellectuel et homme public admiré et haut placé, côtoie le shah d’Iran et pleins d’autres hommes illustres. Il est bien placé, il a de l’argent, une notoriété qui n’est plus à faire et des domestiques pour l’aider dans sa vie quotidienne. Enfin, dernier personnage dont on suivra l’évolution, c’est une femme, Ensiyeh, digne héritière d’un guerrier, chef d’une tribu kurde, qui sera élevée par son père comme un parfait petit homme, prêt à prendre sa relève pour se battre. Elle va tenter coûte que coûte de préserver les terres de ses ancêtres, malgré l’évolution draconienne de la société et son tournant qui ne lui est plus favorable. C’est une guerrière des temps modernes que j’ai bien appréciée.

À travers ces trois personnages, on découvre l’histoire et les traditions de l’Iran des années 70, jusque là bien méconnues par ma personne. Puis un autre Iran va apparaître en 1979, avec la révolution islamique, qui va changer radicalement la société et ses membres. De 1925 à 1979, l’Iran se tourne vers la culture occidentale, tout en tentant de limiter l’ingérence des grandes puissances. À partir de 1953, une dictature se met en place, qui bouscule les traditions iraniennes. Le peuple en colère souffre du manque de liberté, c’est pourquoi le régime impopulaire du shah tombe en 1979 entre les mains des islamistes radicaux. Le rejet de l’occident et de ses pratiques devient un pilier du régime islamiste : les femmes souffrent notamment de ce régiment, soumises à leur mari, elles deviennent des épouses-mères, soumises à la charia et exclues du système publique. Beaucoup s’exilent pour ne plus subir ce nouveau régime, à l’image d’Ensiyeh ou de madame V., qui se réfugient en Europe pour retrouver un semblant de liberté.  

Des iraniens manifestent contre le shah qui a pris le pouvoir du nouveau régime islamiste

Une histoire captivante, bien narrée, extrêmement bien documentée, qui traite d’un sujet plutôt sensible, qu’il est rare de voir aborder dans des livres, de surcroît écrit par une femme française, d’origine iranienne. J’ai appris beaucoup de choses grâce à Nahal Tajadod, même si je dois être passée à côté de pas mal d’autres informations qui n’ont pas été traitées par mon esprit. 

Néanmoins, Debout sur la terre m’a véritablement fait sortir de ma zone de confort pour mon plus grand plaisir ! L’immersion est totale : les personnages atypiques, les lieux bien décrits, les traditions parfois ancestrales. Je déplore néanmoins ma méconnaissance de cette partie de l’histoire, qui m’a empêchée de m’imprégner pleinement de tout ce qui était conté : j’étais parfois perdue parmi ce magma d’informations foisonnantes, certes très intéressantes, mais trop fournies. Il faut persévérer, bien s’accrocher et prendre le temps de savourer chaque page pour ne pas perdre le fil ! Une deuxième lecture serait néanmoins opportune pour mieux comprendre ces 500 pages d’histoire. 


Un roman historique sur l’évolution culturelle de l’iran du XXème siècle. Un récit bien documenté, très bien fourni, mais que les moins initiés à ce pan de l’histoire auront du mal à suivre.

Ma note : 6/10

Pour lire plus d’avis :
    

ISBN : ‎ 979-10-387-0201-1