Papillon de nuit


Papillon de nuit de R. J. Ellory
505 pages, éditions Le Livre de Poche, à 8,70€


Résumé : Assassinat de Kennedy, guerre du Vietnam, luttes pour les droits civiques, Ku Klux Klan : c’est dans cette Amérique en crise des sixties que Daniel Ford a grandi. Et c’est là, en Caroline du Sud, qu’il a été accusé d’avoir tué Nathan Verney, son meilleur ami. 1982. Daniel est dans le couloir de la mort. Peu de temps avant son exécution, un prêtre vient recueillir ses dernières confessions. Bien vite, il apparaît que les choses sont loin d’être aussi simples qu’elles en ont l’air.


Extraits : « Tu gardes tranquillement tes émotions en toi, pour qu’elles ne puissent être réveillées, et quand tu es seul tu peux y réfléchir, les apprécier comme si rien ne s’était passé… mais quand tu n’es pas seul, tu dois comprendre qu’il n’y a pas aucune place pour ces émotions. Tu dois être là où tu es, et être avec la personne qui est avec toi… et si tu n’y arrives pas, alors où que tu sois, et quelle que soit la personne qui est avec toi, tu seras toujours seul… »

« On dirait que tu as un bon ami, Nathan Verney, Un garçon blanc qui prend La Défense d’un Noir de nos jours est une personne courageuse. »


Mon avis : Première rencontre littéraire avec R. J. Ellory, un auteur de polars anglais qui a fait frémir plus d’un lecteur… dont je fais désormais partie ! Dans Papillon de nuit, nous suivons Daniel Ford, un jeune homme accusé d’avoir tué Nathan Verney, son meilleur ami noir. Il est conduit dans une prison spécifique en attendant d’être exécuté pour son crime. Nous le suivons, pas à pas, jusqu’au jour de son exécution. Un parcours jonché des souvenirs qu’il se remémore, qui l’a mené à cet enfer carcéral.

On se situe dans une Amérique des années 1960, 1970 et 1980, où la ségrégation bas son plein, avec l’assassinat de JFK, de Martin Luther King, l’avènement du KKK, la guerre du Vietnam, le Watergate… Une société noire, meurtrie, affaiblie, qui laissera des traces dans l’esprit de tous ses citoyens. J’ai beaucoup aimé découvrir ce pan de l’Histoire, fortement intégrée dans le récit conté. R. J. Ellory nous donne à réfléchir sur de nombreux sujets de société – le racisme, la guerre, la peine de mort -, qui ont particulièrement marqués le siècle dernier et continuent de fleurir dans certains pays du monde. 

C’est dans ce contexte que nous suivons David Ford et Nathan Verney, deux jeunes enfants, l’un blanc et l’autre noir, qui vivent innocemment leur vie dans le petit village de leur enfance. Leurs différences ne les importune pas, ils ne s’en soucient pas et les remarquent à peine ; mais ce sont les autres qui les mettent au pied du mur et les pointent du doigt pour leur différence de couleur de peau. Faisant fi des préjugés et des quant-dira-t-on, les deux jeunes hommes continuent à se côtoyer et à faire les quatre cent coups ensemble. J’ai adoré leur complicité : on ressent tout l’amour qu’ils se portent l’un à l’autre, plein de bienveillance, de soutien et de  réconfort. Ils fonctionnent en binôme et c’est un binôme qui fonctionne bien ! Mais alors, que s’est-il passé pour que David finisse en prison, accusé d’avoir tué son meilleur ami ?

Le suspense est maintenu à son paroxysme, depuis les premiers chapitres, jusqu’au dénouement final. Le temps semble s’étirer en longueurs, comme David dans le couloir de la mort, on ressent l’attente, l’angoisse, la peur de l’inconnu. On se demande sans cesse ce qui a bien pu changer dans leurs rapports et comment une telle chose à pu être possible. Une chose qui nous frappe et que l’on perçoit avec certitude : David regrette énormément la perte de Nathan, à qui il pense presque quotidiennement. Comme on dit, c’est bien la preuve que la mort n’efface pas l’amour.


Un roman noir, qui brosse une fresque historique, politique et sociologique d’une Amérique meurtrie du siècle dernier via l’histoire d’un homme condamné à mort pour avoir assassiné son meilleur ami noir. Dramatique, prenant et déchirant ! 

Ma note : 7/10

Pour lire plus d’avis :
    

ISBN : ‎ 978-22-531-8442-5
Traduction : Fabrice Pointeau

Les pyromanes


Les pyromanes de Vincent Delareux
455 pages, éditions l’Archipel, à 20€


Résumé : Dans un village reculé de Normandie, Thérèse Sommer attise les passions et dicte sa loi : à son mari qu’elle trompe, à sa mère qu’elle méprise, à ses amants qu’elle consume. Libre et indépendante, maîtresse de son petit monde, on ne lui connaît pas de rivale. Jusqu’à la naissance de sa fille. Enfant non désirée, Françoise grandit entre haine et maltraitance. Nuit et jour, elle implore le Ciel et les saints de la libérer de la tyrannie de sa mère. L’une d’elles est de trop. Françoise doit faire un choix : cultiver la flamme d’un cierge pour son salut ou allumer le brasier de la colère ?


Extraits : « Rien, à l’exception de la lumière, ne se répand plus vite qu’un ragot bien brûlant. »

« On a tous un enfant en nous. Si les vieillards babillent comme des bébés, c’est qu’ils renouent avec leur vraie nature. Et les jeunes femmes ne sont elles-mêmes que des gamines qui répètent les erreurs de leurs aînées. Quoi qu’elles disent, elles cherchent un mari qui ressemble à leur père. »


Mon avis : Après le succès rencontré avec son premier roman, Le cas Victor Sommer, Vincent Delareux sort son deuxième livre, Les pyromanes, qui retrace la vie d’un personnage présent dans son précédent roman. Les ingrédients sont quasiment identiques : des personnages particuliers, très mystérieux et une plongée en apnée dans les méandres de la psychologie humaine. 

L’histoire se déroule dans un petit village de Normandie, où Thérèse Sommer est réputée pour tromper impunément son mari avec l’ensemble des hommes du village. Contre toute attente, Thérèse tombe enceinte d’une petite fille non désirée, qu’elle considérera immédiatement comme sa rivale. Cette fille, Françoise, sera élevée dans la peur permanente, elle ne connaîtra pas l’amour maternel ni paternel mais pourra se raccrocher à sa grand-mère, seule pointe de lumière dans son quotidien très noir. 

Françoise grandit dans un environnement familial compliqué, puisqu’elle est rejetée par ses propres parents, ainsi que par l’ensemble des habitants du village et en particulier ses camarades de classe, qui tous, la catégorisent comme étant la fille de Thérèse la gourgandine. Cela l’oblige à se raccrocher aux seules pointes d’espoir qui jalonnent son existence, en l’occurence la religion et la figure de sainte Thérèse de Lisieux, qu’elle prendra comme point de repère tout au long de sa vie. Elle se découvre également une fascination pour le drame du château désaffecté du village, qui a vu un couple d’amoureux issus de la même famille se donner la mort pour s’aimer il y a plusieurs décennies. Un épisode dramatique qui bouleverse et obnubile la jeune femme.

Françoise est une jeune fille fragilisée depuis l’enfance, facilement influençable, naïve mais gentille, pour laquelle on ressent autant de compassion que de peine. Sa personnalité, tout comme celle de sa mère, est entourée de mystères indicibles, qui donnent de la noirceur au récit et une touffeur certaine. On a beaucoup de mal à comprendre leurs agissements, leur façon de penser, de réfléchir et d’agir. Le comportement de la mère et de la fille prouve qu’elles souffrent de troubles mentaux qui peut facilement être considéré comme de la folie pure. Vincent Delareux nous plonge dans des méandres psychologiques complexes, qui donnent une dimension passionnante au récit mais aussi très angoissante.


Un très bon roman, percutant, fascinant, qui ne vous laissera pas indifférent. J’ai beaucoup aimé cette deuxième rencontre littéraire avec Vincent Delareux !

Ma note : 7,5/10

Pour lire plus d’avis :
     

ISBN : ‎ 978-2-8098-4668-3