L’amie prodigieuse, tome 2 : Le nouveau nom


L’amie prodigieuse, tome 2 : Le nouveau nom
de Elena Ferrante
622 pages, éditions Folio


Résumé : « Si rien ne pouvait nous sauver, ni l’argent, ni le corps d’un homme, ni même les études, autant tout détruire immédiatement. »
Le soir de son mariage, Lila, seize ans, comprend que son mari Stefano l’a trahie en s’associant aux frères Solara, les camorristes qu’elle déteste. De son côté, Elena, la narratrice, poursuit ses études au lycée. Quand l’été arrive, les deux amies partent pour Ischia. L’air de la mer doit aider Lila à prendre des forces afin de donner un fils à Stefano.
L’amie prodigieuse, Le nouveau nom et Celle qui fuit et celle qui reste, sont les trois premiers tomes de la saga d’Elena Ferrante.


Extraits : « En réalité, on s’attache aux hommes peu à peu, sans se demander s’ils correspondent ou non à l’idéal que l’on se choisit dans les différentes étapes de sa vie. »

« Dans le monde, tout était équilibre et tout était risque : celui qui n’acceptait pas de prendre des risques et n’avait aucune confiance dans la vie dépérissait dans un coin. »


Mon avis : Quatre mois après avoir fermé le premier tome de L’amie prodigieuse, me voici plongée dans le second volume : Le nouveau nom. On y retrouve avec plaisir les personnages qui nous ont tant marqué dans Enfance, adolescence, mais doté de quelques années supplémentaires. Sous nos yeux, elles évoluent, grandissent et passent de petites filles à femmes accomplies. Elena, notre narratrice, poursuit ses études au lycée, tandis que Lila, sa meilleure amie, dorénavant mariée, travaille dans l’échoppe de son père. Les deux jeunes filles, maintenant âgées de seize ans, entrent dans l’âge adulte et découvrent l’amour et toutes les peines que le coeur peut ressentir face aux sentiments amoureux. Lors de vacances sur l’île d’Ischia, elles se rapprochent de garçons de leur âge qui ne les laissent pas indifférentes. Ces histoires leur apporteront le meilleur… comme le pire.

Il se passe un nombre incalculables de choses dans ce deuxième volume, qu’une simple chronique ne pourrait résumer. Elena Ferrante s’applique à décrire avec le plus de justesse possible le quotidien de nos deux protagonistes, de leurs familles et de leurs proches dans cette Italie du siècle dernier. Les mentalités n’avaient pas encore évoluées, avec des maris, souvent violents, qui travaillent, tandis que leurs femmes restent à la maison pour s’occuper du foyer et des enfants. C’est là que le quotidien de Lila et Elena diverge.

L’une décide d’épouser un homme riche, qu’elle n’aime pas, dans l’espoir de s’élever socialement. Elle vit une vie paisible dans le quartier de son enfance, mais est vite rattrapée par sa condition sociale. Ainsi, Lila reproduit le modèle familial, qui veut que les femmes se marient, aient des enfants et s’occupent de leur famille du mieux possible. Contrairement à elle, Elena choisit de rompre avec le modèle familial et poursuit ses études en dehors de Naples, à Pise, dans l’espoir de s’élever socialement et intellectuellement et de ne jamais retomber dans l’univers oppressant qui l’a vue grandir. Malgré tout, une chose les définie : leur envie de liberté et leur désir de s’émanciper de la vie caricaturale qui leur était toute tracée. Les deux jeunes femmes restent en contact, avec, comme toujours, un lien spécial qui les unie : entre amour et haine, jalousie et bonté, leur amitié est plus que jamais unique en son genre.


Un deuxième tome à la hauteur du premier, peuplé d’aventures amoureuses, familiales et amicales qui nous emportent dans cette Italie au modèle patriarcal du siècle dernier. Je vais m’empresser de débuter le troisième tome !

Ma note : 7,5/10

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ISBN : 978-2-07-269414-4
Traduction : Elsa Damien

Cette histoire-là


Cette histoire-là de Alessandro Baricco
317 pages, éditions Gallimard


Résumé : Ultimo Parri est un jeune homme qui vieillit en s’efforçant de remettre de l’ordre dans le monde.
Il a cinq ans lorsqu’il voit sa première automobile, l’année de la course mythique Versailles-Madrid de 1903, dix-neuf le jour de la grande défaite de Caporetto en 1917, vingt-cinq lorsqu’il rencontre la femme de sa vie, et beaucoup plus le soir où il meurt, loin de sa campagne piémontaise natale.
Cette histoire-là est son histoire, qui nous emporte dans une course effrénée à travers le vingtième siècle, à laquelle l’écriture brillante et habile d’Alessandro Baricco confère une formidable vivacité, pour en faire une de ses plus belles réussites.


Extraits : « Elle me dit : Si tu aimes quelqu’un qui t’aime, ne démolis jamais ses rêves. »

« Il expliqua que personne ne doit jamais penser qu’il est seul, car en chacun de nous vit le sang de ceux qui nous ont engendrés, et cette chose-là remonte jusqu’à la nuit des temps. Ainsi nous ne sommes que le méandre d’un fleuve, qui vient de loin et continuera après nous. »


Mon avis : Alessandro Barrico est un auteur italien de renom, dont j’apprécie particulièrement l’originalité de la plume et le style poétique très particulier des histoires contées. Sans surprise, Cette histoire-là sort aussi du lot. C’est une histoire d’automobiles, de guerre et d’amour. C’est l’histoire d’Ultimo Parri, un petit garçon italien de cinq qui voit pour la première fois de sa vie une voiture. Emerveillé, embarqué par son père dans des courses folles, il rêve alors de bâtir son propre circuit automobile. Malheureusement, il est vite rattrapé par la première guerre mondiale. Enrôlé de force pour combattre lors de la bataille de Caporetto en 1917, il risque de perdre la vie plus d’une fois. Sorti sain et sauf, il quitte son Italie natale pour émigrer aux États-Unis, où il fait la rencontre d’Elizaveta, une russe, professeure de pianos, dont il tombe éperdument amoureux. Hélas, cette histoire d’amour n’étant pas réciproque, Ultimo disparaît, pour ne plus jamais donner signe de vie.

Cette histoire-là est bâtie en trois parties distinctes, qui racontent chacune une période de la vie d’Ultimo : l’enfance et sa passion naissante pour les voitures, son arrivée dans la vie adulte propulsé dans la guerre, puis son passage dans la vie d’adulte émigré dans un autre pays, loin de ses repères. La narration est originale, avec plusieurs narrateurs qui se succèdent pour raconter un bout d’histoire, parfois sans vraiment bien que l’on comprenne qui se trouve aux manettes. Le style est également particulier, ponctué de phrases incomplètes, de blancs, de paragraphes manquants… mais le tout reste gracieux et poétique : du Barrico tout craché !

Il n’y a aucun message particulier à discerner derrière ces mots. Ce n’est qu’un chemin de vie qui se dessine sous nos yeux, un garçon qui devient adolescent puis homme, avant de disparaître. C’est un roman que j’ai trouvé assez complexe, non pas dans la compréhension même du texte, mais plutôt dans l’analyse des personnages, dans l’absorption des émotions.

Ultimo, notre héros, tout comme Elizaveta, qui apparaît longuement dans la dernière partie, sont assez énigmatiques : ils ne laissent rien transparaître de leurs émotions ou de leurs pensées. On ne ressent pas d’attachement particulier envers ces deux personnages, sans doute parce qu’ils nous paraissent distants, un peu froids. On a du mal à comprendre leurs agissements, à clairement voir ce qu’ils ressentent et où ils veulent aller. Cela n’empêche en rien d’apprécier l’histoire et cet aura si particulier qui entoure nos héros.


Un roman poétique qui met en scène deux personnages complexes, qui évoluent et grandissent au début du XXème siècle, entre la naissance de l’automobile et la première guerre mondiale. Des chemins de vie que l’on suit avec volupté et passion. J’étais déjà une adepte d’Alessandro Baricco et je confirme son talent de conteur : j’ai beaucoup aimé. 

Ma note : 8/10

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ISBN : 978-2-07-078150-8
Traduction : Françoise Brun

L’amie prodigieuse, tome 1 : Enfance, adolescence


L’amie prodigieuse, tome 1 : Enfance, adolescence
de Elena Ferrante
429 pages, éditions Folio


Résumé : « Je ne suis pas nostalgique de notre enfance: elle était pleine de violence. C’était la vie, un point c’est tout: et nous grandissions avec l’obligation de la rendre difficile aux autres avant que les autres ne nous la rendent difficile.»
Elena et Lila vivent dans un quartier pauvre de Naples à la fin des années cinquante. Bien qu’elles soient douées pour les études, ce n’est pas la voie qui leur est promise. Lila abandonne l’école pour travailler dans l’échoppe de cordonnier de son père. Elena, soutenue par son institutrice, ira au collège puis au lycée. Les chemins des deux amies se croisent et s’éloignent, avec pour toile de fond une Naples sombre, en ébullition.
Formidable voyage dans l’Italie du boom économique, L’amie prodigieuse est le portrait de deux héroïnes inoubliables qu’Elena Ferrante traque avec passion et tendresse.


Extraits : « Notre monde était ainsi, plein de mots qui tuaient : le croup, le tétanos, le typhus pétéchial, le gaz, la guerre, la toupie, les décombres, le travail, le bombardement, la bombe, la tuberculose, la suppuration. »

« Sans amour, non seulement la vie des personnes est plus pauvre, mais aussi celle des villes. »


Mon avis : Après avoir entendu parler de cette saga familiale pendant de très nombreuses années – en des termes plus que positifs -, je me suis enfin décidé à sortir le premier tome de ma pile à lire.

L’amie prodigieuse, c’est l’histoire de l’amitié assez spéciale qui unie Elena, notre protagoniste, à Lila. Toutes deux très jeunes, elles vivent dans un quartier pauvre de Naples, en plein milieu des années 50 et se montrent particulièrement douées pour les études. Une compétition insidieuse se met en place entre elles deux : c’est à celle qui rapportera les meilleures notes dans leur maison respective. Hélas, Lila est rapidement rattrapée par son milieu social : elle doit abandonner l’école pour aider son père, cordonnier, à réfectionner et vendre ses chaussures. Un coup dur pour Elena, qui se retrouve abandonnée et cherche à trouver un nouveau sens à sa vie. Car sans Lila, son moteur, sa meilleure amie, sa confidente, sa meilleure compétitrice… Elena n’est plus rien : la vie va les éloigner.

Souvent, les opposés s’attirent. C’est le cas pour Lila et Elena, deux jeunes femmes en devenir au caractère très différent. Lila est impulsive, c’est une jeune fille rebelle, qui n’a pas peur de déroger aux règles, d’affronter de face les conflits. Elle est incroyablement intelligente, mais ne se vante pas, au contraire, elle garde une part de mystère conséquente, qui fait qu’on n’arrivera presque jamais à la cerner entièrement. Quant à Elena, plus réservée et calme, elle se laisse facilement emporter par la fougue de son amie et rêve secrètement de lui ressembler. Une amitié passionnelle les unie, bien qu’un peu bancale ; Elena semble ressentir bien plus de sentiments envers Lila que cette dernière, qui ne montre que trop peu ce qu’elle ressent pour Elena. J’ai été émue de cette amitié hors du commun, mais j’ai parfois ressenti de la douleur pour Elena, puisqu’elle semblait entretenir un lien d’amitié à sens unique. Entre fidélité, amour, jalousie, haine… toutes les émotions transparaissent entre ces deux jeunes filles que tout oppose.

Outre ces deux héroïnes, on découvre tout un florilèges de personnages, qui vont venir enrichir le quotidien d’Elena et Lila. Les garçons seront nombreux à courtiser les jeunes filles : Pasquale, le maçon, Nino, l’intello, Antonio, le mécano, les frères Solara, les riches mafieux… elles n’ont que l’embarras du choix ! On découvre surtout que les familles napolitaines sont souvent en rivalité les unes avec les autres : chacun se bat pour acquérir la meilleure place dans cette société napolitaine en plein essor.

L’auteure nous immerge dans l’Italie du milieu du XXème siècle. On en apprend plus sur l’histoire sociale et politique du pays. Nos deux héroïnes grandissent dans un monde étriqué, où la violence, les injustices sociales et le machisme sont monnaie courante. Obligées de se construire sur des bases branlantes, elles ne peuvent que perpétrer ce que le passé leur offre. Un avenir tout tracé et limité. Mais Elena rêve de plus grand et tente de contrer son destin, malgré les récriminations de ses parents, qui ne comprennent pas l’intérêt de poursuivre des études onéreuses.

La saga d’Elena Ferrante a été adaptée au cinéma ; je n’ai pour le moment pas eu le temps de voir la première saison, mais je pense que j’essayerai de la visionner dans les mois qui viennent : l’émotion devrait y être encore plus puissante !


Elena Ferrante nous offre le portrait sensible et humain de deux jeunes filles qui se sont prises d’amitié, mais que tout oppose.  L’occasion de s’immerger dans les années 50 au coeur d’un quartier pauvre de Naples, avec son lot de restrictions sociales et politiques, de violences, d’inégalités et d’injustices. Je lirai le deuxième tome avec plaisir !

Ma note : 7,5/10

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ISBN : 978-2-07-046612-2
Traduction : Elsa Damien

Brigantessa


Brigantessa de Giuseppe Catozzella
371 pages, éditions Buchet Chastel, à 22,50€


Résumé : Calabre, milieu du XIXe siècle. L’enfance de Maria Olivero est bercée par la misère et la pauvreté, dans une famille où l’amour se tapit et où la liberté ne connaît pas de visage. Sa mère est tisserande, son père journalier, ensemble ils peinent à subvenir aux besoins de leurs quatre enfants. Un événement inattendu va alors bouleverser l’enfance de Maria et l’équilibre de la fratrie. Teresa, l’aînée que l’on avait confié à une riche famille dans l’espoir de lui offrir un avenir meilleur fait son retour à la maison après le décès brutal de ses parents adoptifs.
Méprisante et détestable, l’adolescente promet à Maria de lui gâcher la vie. Victime des caprices de son aînée, celle-ci est très vite envoyée chez sa tante Maddalena qui l’éduquera à la solitude et esquissera pour elle les prémices d’une vie au coeur des montagnes dans la vallée de la Sila. C’est le début d’une rivalité sans fin entre les deux soeurs qui marquera considérablement la vie de Maria.
La jeune femme découvrira l’amour et la passion auprès de son mari Pietro, dont les idéaux le porteront à s’engager en faveur de l’unité italienne aux côtés de Garibaldi, mais également le cri de la violence et de la trahison. Malgré les tentatives assidues de Teresa de la réduire à néant, Maria est forte, elle ne fléchit pas. La vengeance mûrit, en elle tout explose, elle devient alors Ciccilla, l’indomptable brigantessa dont le destin et le nom, bien au-delà de la vallée, seront bientôt connus dans toute l’Italie.


Extraits : « Nous sommes des femmes, Mari, il aurait mieux valu être des hommes. Nous ne pouvons que subir. Fais attention, car il n’y a pas beaucoup d’hommes honnêtes. »

« Si tu veux avoir des droits, si tu veux changer ton destin, il faut que tu lises, il faut que tu fasses des études. »


Mon avis : Brigantessa est un livre assez complexe, qu’il m’a été donné l’opportunité de lire grâce à Babelio. L’histoire se passe au XIXème siècle en Calabre, au sud-ouest de l’Italie, dans un milieu où la pauvreté fait rage. Les promesses données par les dirigeants ne sont pas tenues : l’usage collectif des terres, l’abolition des impôts sur la farine et le sel, ou encore le partage des terres… les puissants gardent à leur main et ne répartissent pas parmi la population, affamée, appauvrie, totalement désespérée. Pour palier à la déchéance familiale, les parents de Maria ont fait le choix d’envoyer leur fille aînée, Teresa, vivre dans une famille aisée de Naples. Maria devait sa soeur quelques temps plus tard, mais le décès subit des parents adoptifs fait revenir les deux jeunes filles au foyer familial. Une dégringolade sociale inacceptable pour Teresa, qui renie les siens et va jusqu’à leur faire vivre un enfer, en particulier à Maria, qu’elle juge comme responsable de sa situation nouvelle. Heureusement, Teresa croise la route d’un jeune homme fort fortuné, qui va lui redonner l’aisance financière et sociale opportune, au désarroi de sa famille, restée dans le besoin.

J’ai été totalement dépaysée en débutant dans cette lecture. Le contexte historique, sociétal et géographique s’y prête totalement, puisque l’histoire se passe dans un lieu que je ne connais pas, à une époque dont je suis peu familière, dans des circonstances sociales bien éloignées de ce que nous pouvons connaître dans notre monde moderne. Autant dire que le choc est brutal, peut-être bien un peu trop, puisqu’un temps d’adaptation est nécessaire pour pleinement prendre plaisir à lire Brigantessa. De surcroît, c’est une histoire assez complexe, qui narre un pan historique intéressant mais très dense sur les bouleversements politiques, les brigandages et toute la soif de liberté qui en découle. Le roman est richement documenté, mais des recherches complémentaires sont nécessaires pour se saisir pleinement du contexte ; d’où l’impression de distance que j’ai ressentis tout au long de ma lecture.

Pour être parfaitement honnête, l’histoire ne m’a pas passionnée. Les personnages sont finalement assez quelconque, il ne s’en dégage aucune énergie spécifique, pas de caractère ou de personnalité intéressant, hormis sans doute Teresa, une figure froide, antipathique, sans émotions, qui sort du lot et dont on se souvient. L’écriture en elle-même est assez plate, les aventures historiques se déroulent uniquement en toile de fond mais ne m’ont pas particulièrement transcendées. Je ressors quand même déçue de cette lecture, que j’ai presque totalement oubliée, dix jours seulement après avoir lu la dernière page.


Un roman historique assez complexe, riche d’informations mais en définitive assez plat, qui ne m’a pas particulièrement passionnée.

Ma note : 4/10

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ISBN : 978-2-283-03566-5
Traduction : Nathalie Bauer

La fille dans le brouillard


La fille dans le brouillard de Donato Carrisi
347 pages, éditions Le Livre de Poche, à 7,30€


Résumé : Une jeune femme est enlevée dans un paisible petit village des Alpes. Le coupable est introuvable, et voilà que la star des commissaires de police, Vogel, est envoyé sur place. De tous les plateaux télé, il ne se déplace jamais sans sa horde de caméras et de flashs. Sur place, cependant, il comprend vite qu’il ne parviendra pas à résoudre l’affaire, et pour ne pas perdre la face aux yeux du public qui suit chacun de ses faits et gestes, il décide de créer son coupable idéal et accuse, grâce à des preuves falsifiées, le plus innocent des habitants du village : le professeur d’école adoré de tous. L’homme perd tout du jour au lendemain (métier, femme et enfants, honneur), mais de sa cellule, il prépare minutieusement sa revanche, et la chute médiatique de Vogel.


Extraits« Parce qu’il n’y a rien de pire qu’un cadeau qui n’arrive pas à son destinataire. Le bonheur qu’il contient pourrit lentement, contaminant tout autour de lui. »

« Le pouvoir du mal qui arrive à un autre, pensa Martini.
Il constituait un baume dans la vie des étrangers, qui redécouvraient ainsi la vraie valeur des choses. Par peur de les perdre, ils s’empressaient de les choyer, avant que quelqu’un ou quelque chose ne les emporte. »


Mon avis : J’ai découvert Donato Carrisi à travers Le tribunal des âmes, un polar complexe, qui m’avait moyennement emballé. Néanmoins, j’ai retenté ma chance avec La fille dans le brouillard, un polar psychologique moins violent, haletant et surprenant.

Anna Lou Kastner a disparue la veille de Noël. Cette jeune fille rousse aux tâches de rousseur est issue d’une famille très croyante, qui prie chaque jour Jésus pour que leur fille revienne saine et sauve à la maison. C’est le commandant Vogel, un policier expérimenté, qui est en charge de l’enquête. Escorté du lieutenant Borghi, ils vont tenter de comprendre ce qui est arrivé à Anna Lou. Très vite, ils se rendent compte que le professeur Martini, un homme pourtant sans histoire, à la vie rangée, père et mari aimé et aimant, enseignant de littérature passionné et érudit, devient le coupable numéro un. Mais pour quel motif aurait-il enlevé Anna Lou ? Le mystère reste entier.

Il n’y a que peu de scènes de violences dans ce polar. L’auteur l’oriente plus comme une histoire psychologique, où la peur et la tension constantes gouvernent le récit. On est rapidement happé par les scènes qui se jouent sous nos yeux, on se prend à conspirer pour trouver le coupable et son mobile. Le suspense est continu et c’est ce qui fait l’attrait principal du livre. L’auteur décortique également le pouvoir et le rôle des médias et de l’opinion publique dans le déroulé d’une enquête. On se rend compte avec effarement qu’ils ont une influence incroyable, un retentissement qui peut à la fois être néfaste ou bénéfique à une enquête. Dans le cas du commandant Vogel, il manipule la presse avec brio, complotant avec l’envoyée spéciale Stella Honer pour lui fournir des scoops (souvent peu avérés) en avant-première. Tout le monde y trouve son compte.

En effet, on ne peut pas réellement s’attacher aux personnages, qui nous semblent manquer cruellement de consistance. Les victimes – j’entends la famille de la jeune disparue -, ne nous font ressentir aucune pitié, aucune tristesse. Le commandant Vogel reste froid, détaché, distant. Quant au  professeur Martini, il plane au-dessus de lui un mystère qui nous empêche de voir réellement son vrai visage. En définitive, ce sont des personnages vides, qui sont là uniquement pour servir le suspense du récit.

Le dénouement est tout simplement génial. Un retournement de situation inattendu, comme on aime trouver dans ce genre d’histoire. Par cette fin spectaculaire, Donato Carrisi se place comme un maître de la surprise : chapeau l’artiste ! Mais (il y a un mais !), pour la prochaine fois, plus d’explications sur les crimes, leurs mobiles, les procédés employés… auraient été de bon aloi. Il est bon d’avoir des idées, mais il faut qu’elles soient cohérentes avec l’histoire en place.

Le livre de Donato Carrisi a été adapté au cinéma en 2017, sous le nom de « La regazza nella nebbia », puis traduit et diffusé en France sur Canal+. Je doute de le regarder un jour, puisque je connais déjà le fin mot de l’histoire, d’autant que la bande-annonce semble moins dynamique que le roman écrit.


Un polar psychologique où la peur gouverne le récit. L’histoire est attrayante, le suspense continu, mais les personnages peu attachants.

Ma note : 6,5/10

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ISBN : 978-2-253-08652-9
Traduction : Anaïs Bouteille-Bokobza