La mort du roi Tsongor


La mort du roi Tsongor de Laurent Gaudé

300 pages, éditions France loisirs


Résumé : Au coeur d’une Afrique ancestrale, le vieux Tsongor, roi de Massaba, souverain d’un empire immense, s’apprête à marier sa fille. Mais au jour des fiançailles, un deuxième prétendant surgit. La guerre éclate : c’est Troie assiégée, c’est Thèbes livrée à la haine. Le roi s’éteint mais ne peut reposer en paix dans sa cité dévastée. A son plus jeune fils, Souba, échoit la mission de parcourir le continent pour y construire sept tombeaux à l’image de ce que fut le vénéré — et aussi le haïssable —roi Tsongor.

Roman des origines, récit épique et initiatique, le nouveau livre de Laurent Gaudé déploie dans une langue enivrante les étendards de la bravoure, la flamboyante beauté des héros, mais aussi l’insidieuse révélation, en eux, de la défaite. Car en chacun doit s’accomplir, de quelque manière, l’apprentissage de la honte. Telle est en effet la vérité cachée, celle qui s’impose par-delà les élans du coeur et les lois du clan. Telle est peut-être l’essence même de la tragédie.


Extraits : « Il avait trouvé le lieu de sa mort. Il devait en être ainsi pour chaque homme. Chacun avait une terre qui l’attendait. Une terre d’adoption dans laquelle se fondre. »

« À gauche de Bandiagara étaient les crânes rouges menés par Karavanath’ le brutal. Ils avançaient le crâne rasé et peint en rouge, montrant ainsi qu’ils avaient le sang de leurs ennemis en tête. Ils portaient des colliers autour du cou car les jours de guerre étaient, pour eux, jours de fête.« 


Mon avis : La mort du roi Tsongor est un roman primé en 2002 du Goncourt des lycées, puis l’année suivante du Prix des libraires. C’est une oeuvre magistrale, qui est devenue presque un classique de la littérature française, puisqu’il me semble qu’elle a été intégrée au programme du baccalauréat de français. Autant dire une belle consécration pour Laurent Gaudé !

Comme le titre de l’oeuvre l’indique, le roi Tsongor est mort, tué par son fidèle serviteur Katabolonga, qui lui avait fait une promesse de vengeance des années auparavant. Sa mort survient au pire moment qu’il soit : Tsongor s’apprêter à marier sa seule fille Samilia au prince Kouame, des Terres du sel. Tout aurait été pour le mieux, si ce n’est l’arrivée de Sango Kerim, élevé plus jeunes avec les enfants de Tsongor, qui revient avec une promesse de fidélité faite par Samilia des années plus tôt. Le dilemme est de taille pour cette dernière : doit-elle tenir sa parole faite dans l’enfance à Sango Kerim ou honorer sa promesse de mariage à Kouame ? En tout les cas, son choix aura des conséquences désastreuses sur le royaume et sur l’honneur de sa famille.

Sans décision tranchée prise par Samilia, les deux prétendants se déclarent la guerre. C’est à celui qui tuera l’autre pour pouvoir prendre la belle comme épouse. Le royaume de Massaba est mis à sac. Massacre, pillage, violence, la guerre s’éternise et semble ne jamais finir. Le sang coule à flot, les corps s’entassent, les guerriers sont à bout de souffle, mais aucun camp ne se repli et personne n’abandonne. Le royaume est dévasté, la fratrie même du roi est divisée et s’entre-tuent sans vergogne. L’action est omniprésente, Laurent Gaudé ne nous laisse aucun temps mort, tout s’enchaîne avec fluidité et précision, pour nous livrer une histoire dynamique, fougueuse et enragée.

En parallèle, on pourrait dire que La mort du roi Tsongor est un roman épique, puisque l’on peut suivre Souba, le plus jeune fils de Tsongor, qui s’est vu confier une mission par son père avant de mourir. Son épopée va le conduire vers des contrées lointaines, dans une quête honorifique à la recherche de la vérité et de la spiritualité, loin de la guerre qui fait rage à Massaba. Un héros qui fait étrangement écho à Ulysse, dans L’Odyssée, qui quitte sa patrie pour errer pendant près de vingt ans, pendant que son royaume est à feu et à sang.

En lisant ce récit, on ressent avec bonheur l’ensemble des références littéraires et culturelles que l’auteur a dû utiliser pour écrire son oeuvre : récits mythologiques, quêtes initiatiques, tragédies classiques, diverses références à l’imaginaire africain ou encore à l’antiquité… Vous l’aurez compris, c’est une oeuvre riche et hétéroclite, incroyablement bien construite, plein d’exotisme et de métissage.

Une adaptation théâtrale a découlée du roman de Laurent Gaudé. Réalisée en 2009 par Olivier Letellier, elle retrace, avec habileté l’histoire originelle en une heure à peine. J’avoue qu’après cette adaptation, je verrai bien, pourquoi pas dans les années à venir, une adaptation cinématographique. Ce serait une juste récompense pour la magnifique histoire livrée ici.

 


Une oeuvre magistrale, épique, héroïque, peuplée de références littéraires, qui nous invite au voyage. Un récit magnifiquement bien écrit, riche et intemporel, que je vous recommande chaudement !

Ma note : 9/10

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7 réflexions sur “La mort du roi Tsongor

  1. La cueillette d'une roussette dit :

    En lisant ta chronique je me suis rappelée de l’histoire, ça fait quelques années que je l’ai lue mais cela reste un bon souvenir. Je l’avais étudiée au lycée et ce que tu dis est vrai, c’est une tragédie et la référence à Ulysse n’est pas anodine 😉 De plus, dans cette histoire on apprend pleins de choses sur les rites et coutumes des autres peuples du monde tout en en découvrant plus sur le Roi et qui il était vraiment. Une très bonne lecture donc je suis contente que tu l’aies appréciée 😉

    Aimé par 1 personne

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