Changer l’eau des fleurs


Changer l’eau des fleurs de Valérie Perrin
665 pages, éditions Le Livre de Poche, à 8,90€


Résumé : Violette Toussaint est garde-cimetière dans une petite ville de Bourgogne. Les gens de passage et les habitués viennent se réchauffer dans sa loge où rires et larmes se mélangent au café qu’elle leur offre. Son quotidien est rythmé par leurs confidences. Un jour, parce qu’un homme et une femme ont décidé de reposer ensemble dans son carré de terre, tout bascule. Des liens qui unissent vivants et morts sont exhumés, et certaines âmes que l’on croyait noires, se révèlent lumineuses. Après l’émotion et le succès des Oubliés du dimanche, Valérie Perrin nous fait partager l’histoire intense d’une femme qui, malgré les épreuves, croit obstinément au bonheur. Avec ce talent si rare de rendre l’ordinaire exceptionnel, Valérie Perrin crée autour de cette fée du quotidien un monde plein de poésie et d’humanité. Un hymne au merveilleux des choses simples.


Extraits : « Dieu est à l’image de l’homme. Ça veut dire qu’il ment, qu’il donne, qu’il aime, qu’il reprend, qu’il trahit comme tout un chacun. »

« Il y a plus fort que la mort, c’est le souvenir des absents dans la mémoire des vivants. »


Mon avis : Je ne m’attendais pas à autant aimer cette histoire ! Violette Trenet est née sous X. Après avoir été brinquebalée de famille d’accueil en famille d’accueil, à tout juste 18 ans, alors serveuse dans un bar, elle croise le regard de Philippe Toussaint, avec qui elle se mariera peu de temps après. De leur union naîtra Léonine, une petite fille épanouie et souriante, entourée d’une mère aimante. Le père, bien trop souvent absent, occupé à faire de la moto, à courir les jupons et jouer aux jeux vidéo, délaissera totalement la mère comme la fille. D’abord gardes-barrières à l’orée d’une voie de chemin de fers, Violette et Philippe seront contraints de quitter leur emploi en raison de l’automatisation des systèmes de sécurité des voies. Pour parer à leur licenciement forcé, Violette leur trouve une place comme gardiens de cimetière à Brancion-en-Chalon, un petit village de Bourgogne. Mais Philippe ne s’y plaît pas et disparaît mystérieusement du jour au lendemain, sans jamais plus donner signe de vie. Une nouvelle qui va ravir Violette, délestée du poids de son mari absent, volage, bon à rien, qui faisait simplement preuve de présence effective plutôt que de soutien affectif, moral ou financier. 

Il est compliqué de poser des mots sur ce récit, tant l’histoire est dense et les émotions variées. On passe continuellement du rire aux larmes, de la joie à la peine, du bonheur au désespoir, de la vie à la mort. Bien que la mort soit omniprésente à travers le lieu de vie de Violette et les péripéties qui surviennent dans le cimetière et dans sa vie personnelle, il ne s’agit pas ici de dépeindre un contexte lugubre, perturbant ou de faire pleurer dans les chaumières. Au contraire, je trouve que l’auteure dé-diabolise à merveille ce sujet, en le rendant accessible, en en parlant ouvertement de manière simplifiée, comme une épreuve qui fait partie intégrante de la vie. On a presque moins peur de la mort, on en vient à moins l’appréhender, on relativise aussi en voyant les tristes événements qui surviennent dans la vie des autres. C’est ce dernier point qui est assez frappant : se rendre compte de la chance que l’on a, quand on voit le malheur que certains peuvent vivre. Il y a un aspect réflexif dans ce récit, qui nous enjoint à penser à la vie et à la mort de différentes manières.

Car tous les personnages du roman sont cabossés par l’existence, particulièrement Violette, une femme touchante, qui a sacrifiée une bonne partie de sa vie plutôt que de la vivre pleinement. Enchaînée à son mari à qui elle était attachée sans être amoureuse, elle n’a connu qu’un seul homme dans sa vie, qui l’a traitée avec mépris et indifférence. Violette est persuadée de mériter ni bonheur ni l’amour et prend rapidement peur lorsqu’il est question d’extérioriser ses sentiments. C’est une femme d’une sensibilité extrême, dotée d’un courage immense, qui, bien que maltraitée par la vie, reste bienveillante, souriante et d’une générosité simple mais bienheureuse. Elle a un mode de vie atypique, dans un cimetière, elle se contente du minimum : un jardin potager, du thé pour recevoir ses convives et des amis qui viennent lui tenir compagnie presque quotidiennement.

Le cadre de vie peut faire peur, mais il se veut finalement empli de sérénité. Bizarrement, je m’y suis sentie vraiment bien, totalement à l’aise et aucunement gênée de déambuler parmi les tombes ou de consoler les veufs éplorés avec Violette.

J’ai été tout simplement captivée par cette histoire, par l’écriture enivrante de Valérie Perrin, mais aussi par le quotidien de Violette, qui est finalement assez banal si l’on met de côté son lieu de vie. Je n’ai pas vu passer les 665 pages et j’aurai volontiers prolonger ma lecture quelques centaines de pages supplémentaires. L’ensemble est plein de légèreté, d’insouciance, avec des touches de poésie au début de chaque nouveau chapitre (des citations extraites de livres, de films, de séries… qui tournent autour d’un sujet commun, la mort, mais qui mènent à la réflexion).


Une excellente découverte, que je ne peux que vous recommander. C’est un livre simple, authentique mais poétique, qui vous fera passer par toutes les gammes d’émotions et vous poussera à la réflexion sur une thématique en particulier, la mort, parfois jugée lugubre et sombre, mais judicieusement traité par Valérie Perrin.   

Ma note : 9,5/10

Pour lire plus d’avis :
     

ISBN : ‎ 978-2-253-23902-7

6 réflexions sur “Changer l’eau des fleurs

  1. Alice Delkinger dit :

    Bonjour Analire ! J’ai lu ce roman il y environ 1 an, et même si je l’avais plutôt apprécié (sûrement pas autant que toi cependant), il ne m’est pas resté en tête. C’est vrai que c’est un roman très simple à lire, qui se dévore à une vitesse étonnante, mais pour autant il n’a pas accroché à ma mémoire. D’ailleurs j’ai aussi lu « Les oubliés du dimanche » de l’autrice qui m’avait en revanche plutôt déçue. Est-ce que tu l’as lu ?
    Bonne lecture 🙂

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