Délit de fuite


Délit de fuite de Dominique Dyens
233 pages, éditions France Loisirs, collection Piment


Résumé : Anne a trente-six ans et tout semble lui réussir. Mais elle est seule, terriblement seule. Un 3 décembre, jour où son père s’est suicidé, elle craque et part au hasard des routes.

Au bord de la folie, elle échoue dans un hôpital psychiatrique. À sa sortie, elle est assignée en qualité de témoin dans une affaire de meurtre.

Que s’est-il passé ? Qui est cet homme qui l’a soignée et semble lui voler son histoire ?


Extraits« La jeune fille innocente s’était transformée au fil du temps en une femme autoritaire, rigide et intransigeante en affaires. Ses espérances étaient emmurées dans des blocs de ciment et ses rêves s’étaient figés. Alors, pour ne pas sombrer, Anne Duval s’était jetée à corps perdu dans un métier qui lui donnait l’illusion de maîtriser son existence. Mais le soir, lorsqu’elle quittait sa tour, la jeune femme réalisait que toute son énergie n’avait été employée qu’à réussir sa vie professionnelle.
Elle avait trente-six ans. Déjà. Et aucun homme à aimer ou qui l’aimât encore. »

« – On ne fuit pas sa vie ! On l’assume ! »


Mon avis : Voilà plusieurs années que Délit de fuite sommeillait dans ma Pile à lire. Je l’ai choisi, totalement au hasard, sans me douter un seul instant de l’histoire que j’allais y découvrir. J’ai donc fait la rencontre d’Anne Duval, une jeune parisienne de trente-six ans, bien installée professionnellement, dotée d’une réputation de travailleuse, habitant dans un bel appartement rue Delambre. Seule ombre au tableau : Anne est seule ; alors qu’elle rêve de se marier et d’avoir une petite fille, elle n’a, pour le moment, que son travail, sa mère, qui se meurt à l’hospice et le plaisir sexuel, qu’elle partage avec de parfaits inconnus, dont un coursier, dont elle a particulièrement honte. Le 3 décembre de cette année 2009, s’en est trop : Anne craque. Une date qui n’est pas choisie au hasard, puisque plusieurs années auparavant, son papa s’est suicidée un 3 décembre. Anne prend la route, direction la campagne. Elle roule, perdue, persuadée de rencontrer l’homme de sa vie sur son chemin.

Anne est un personnage à la psychologie complexe. Beaucoup peuvent la traiter de folle, de dépressive, de menteuse, de nymphomane. Je pense qu’elle est un peu de tout ça ; mais c’est avant tout une jeune femme triste, solitaire, abandonnée, perdue dans sa vie, qui recherche désespérément une aide bienveillante, une oreille attentive, une main tendue. J’ai été particulièrement touchée par le désespoir de cette femme, par son désir de mari et d’enfant, qui tourne à l’obsessionnel – elle s’invente une vie de femme épanouie auprès de sa mère, n’hésitant pas à donner un prénom à son mari, Patrick, et à sa belle-fille, Capucine. À côté de ça, Anne déambule dans les rues de Paris, s’engouffre dans les magasins et les cafés, à la recherche d’un modèle d’homme dont elle pourrait s’affubler. Certaines scènes m’ont clairement attristées, tant on ressent la souffrance d’Anne et son besoin d’être aimée. On a envie de l’aider, de lui crier de s’accrocher, de lui insuffler espoir et amour.

L’histoire est construite d’une façon originale : elle est tantôt racontée par Anne, l’héroïne, tantôt par son psychiatre, qui essaie de nous faire comprendre l’origine des troubles de la jeune femme. Ajoutons à cela un troisième narrateur, assez mystérieux, un certain Kretz, écrivain de métier, qui pose des mots sur l’histoire d’Anne. Trois points de vue différents, qui se focalisent autour d’une seule et même personne et qui nous montre trois héroïnes en une seule, tant les points de vue sont divergents. On peut d’ailleurs faire un énorme parallèle entre la Anne du début, femme d’affaire, très professionnelle, que l’on ressent comme sûre d’elle, totalement stable et la Anne qui se découvre au milieu du récit : psychotique, seule, menteuse, qui s’invente des histoires et en invite aux autres, qui divague, se morfond. La bascule est brutale, un fossé sépare ces deux personnalités.

Je ne pensais pas autant apprécier cette histoire et pourtant, j’ai été capturée du début à la fin, si bien que je l’ai presque lu d’une traite. Il y a un certain suspense qui se met en place autour du personnage d’Anne, une certaine empathie, qui donne envie de voir si cette jeune femme va réussir à s’en sortir. Le dénouement est quant à lui à la hauteur du livre : on pressent ce qui va arriver, mais on est quand même surpris.


Un roman psychologique sombre, qui mélange amour, folie et suspense. Un récit captivant, que j’ai pris beaucoup de plaisir à découvrir.

Ma note : 7,5/10

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ISBN : 978-2-298-02613-9

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