Le tatoueur d’Auschwitz


Le tatoueur d’Auschwitz de Heather Morris
318 pages, éditions J’ai Lu, à 7,90€


Résumé : L’histoire vraie d’un homme et d’une femme qui ont trouvé l’amour au cœur de l’enfer. Sous un ciel de plomb, des prisonniers défilent à l’entrée du camp d’Auschwitz. Bientôt, ils ne seront plus que des numéros tatoués sur le bras. C’est Lale, un déporté, qui est chargé de cette sinistre tâche. Il travaille le regard rivé au sol pour éviter de voir la douleur dans les yeux de ceux qu’il marque à jamais. Un jour, pourtant, il lève les yeux sur Gita, et la jeune femme devient sa lumière dans ce monde d’une noirceur infinie. Ils savent d’emblée qu’ils sont faits l’un pour l’autre. Dans cette prison où l’on se bat pour un morceau de pain et pour sauver sa vie, il n’y a pas de place pour l’amour. Ils doivent se contenter de minuscules moments de joie, qui leur font oublier le cauchemar du quotidien. Mais Lale fait une promesse à Gita : un jour, ils seront libres et heureux de vivre ensemble.


Extraits : « Ce qui les unit, c’est la peur. Leur jeunesse aussi. Et leur religion. »

« La politique t’aide à comprendre le monde, jusqu’à ce que tu ne le comprennes plus du tout ; puis à cause de la politique, tu te retrouves dans un camp de prisonniers. À cause de la politique et de la religion, les deux. »


Mon avis : Il existe de très nombreux romans historiques et biographiques sur l’histoire de la Seconde guerre Mondiale. Mais l’histoire d’une naissance d’amour entre deux juifs emprisonnés à Auschwitz… je n’en avais encore lu aucun jusqu’à présent.

Le tatoueur d’Auschwitz, c’est Lale, un déporté, également emprisonné dans le plus célèbre camp de concentration du monde, qui a pour mission de tatouer le numéro de chaque nouvel arrivant. Une mission physiquement supportable, mais moralement épuisante, puisque le tatoueur voit la peur, la panique, la tristesse, les questionnements, la souffrance, dans les yeux de ces nouveaux arrivants, qui ne savent pas encore ce qui les attend. C’est en tatouant un wagon de femmes qu’il rencontre pour la première fois Gita, une jeune femme juive, qui deviendra sa lumière dans cet environnement si noir. Lale et Gita vont se retrouver pendant de brefs instants volés et des sentiments vont progressivement apparaître entre ces deux personnes qui vivent pourtant un cauchemar éveillé. Mais Lale l’a promis à Gita : un jour, ils seront libres et vivront heureux à l’extérieur. Il faut seulement beaucoup de patience, du courage et garder espoir.

Cette histoire s’est réellement déroulée à Auschwitz. Elle a été mise par écrit par Heather Morris, qui a recueillie pendant trois longues années les propos de Lale Sokolov, devenu vieillissant, pour garder une trace de cette si belle histoire. Ce livre est également un hommage à Gita, sa femme, décédée en 2003, trois ans avant lui. J’ai été très émue par cette histoire d’amour, assez pudique, que l’on voit naître sous nos yeux. La rencontre entre Lale et Gita, improbable, leur attachement et leur soutien indéfectible, puis leur amour, qui transcende les souffrances, pour se perpétuer durant l’éternité. Après les camps, ils vécurent ensemble, heureux, jusqu’à leur mort. Leur amour aura engendré un fils, Gary, né en 1961.

Photos de Lale et Gita

À travers cette histoire, Heather Morris met en lumière les atrocités commises par les Allemands sur les juifs. Affaiblis, humiliés, ils doivent réaliser des travaux indécents pour sauver leur peau et sont traités comme de véritables bêtes de foire. Ils vivent dans la crasse, la promiscuité, ils ne savent pas s’ils survivront au jour d’après : chaque jour est une victoire sur celui d’avant. 

J’ai été touchée par le comportement de Lale, qui est un véritable héros d’Auschwitz. Lale n’hésite pas à mettre sa vie en danger en marchandant avec des ouvriers extérieurs pour améliorer les conditions de vie des prisonniers du camp. Ainsi, il troque des bijoux et de l’argent récupérés dans des affaires de prisonnier contre de la nourriture et des médicaments, qu’il distribue allègrement à l’ensemble de ses compagnons d’infortune. Lale fait montre d’un grand courage et de beaucoup d’altruisme. Dans ce monde inhumain, il reste une once d’humanité qui fait plaisir à voir.


Un récit biographique bouleversant, sur l’histoire d’amour du tatoueur lale et de gita au camp de concentration d’auschwitz. horreur et amour se confondent mais l’amour est toujours plus fort que tout. ce livre m’a mis la larme a l’oeil et rend un bel hommage à ce couple exemplaire. 

Ma note : 8,5/10

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ISBN : 978-2-290-23379-5
Traduction : Jocelyne Barsse

Une larme m’a sauvée


Une larme m’a sauvée de Angèle Lieby
189 pages, éditions Pocket


Résumé : Ça a commencé, un jour de juillet, par des picotements au bout des doigts, un violent mal de tête, la perte de réflexes… Rapidement, l’état d’Angèle s’aggrave et les médecins décident de la plonger dans un coma artificiel. Le temps passe et Angèle reste dans le noir. Un noir profond où, consciente, elle crie sa douleur et sa peur, mais où personne ne peut l’entendre. Alors elle pleure à l’intérieur. Et soudain, une larme coule le long de sa joue. Une larme qui la ramène vers le monde des vivants… Ce témoignage a bouleversé plus de 180 000 lecteurs.


Extraits : « Je ne suis pas le genre à courir les tombes, c’est vrai. Je pense que les fleurs, il vaut mieux les donner aux vivants. Pourquoi recouvrir les morts sous les bouquets ? Ils sont déjà ensevelis sous la terre. »

« Je me compare à un arbre : ça ne bouge pas, un arbre, c’est inerte, ça ne dit rien, ça ne crie même pas quand on le coupe ; et pourtant, ça vit. Si l’on décidait de me débiter en tranches là, maintenant, moi non plus, je ne pourrais pas protester. »


Mon avis : Angèle Lieby est une survivante. C’est une guerrière, une combattante, qui a subie les pires atrocités, mais qui a réussie à s’en sortir, par sa volonté. Aujourd’hui, elle témoigne à coeur ouvert sur ce qu’elle a vécu.

Suite à des symptômes plus ou moins inquiétants, Angèle est placé par les médecins dans un coma artificiel. Elle y restera plusieurs jours, inconsciente en apparence, mais parfaitement consciente de ce qui se déroulait autour d’elle. Elle ressent, sent, entend tout : les médecins qui la maltraitent physiquement, qui conseillent de la débrancher, qui discutent avec son mari des pompes funèbres… Malgré tout, Angèle reste impuissante, dans l’impossibilité de se réveiller, de réagir, de protester. On ressent avec force l’angoisse qui a dû l’étreindre. 

Ce témoignage met en avant des pratiques peu professionnelles de la part du corps soignant (attitudes déplacées, souffrances inutiles, manque de rigueur, de douceur, de patience,…). Le manque d’effectif criant que l’on peut percevoir dans cette branche ne justifie pas de telles pratiques. Loin d’être une diatribe envers le corps médical, ce récit permet de sensibiliser les soignants afin de ne plus reproduire certaines erreurs envers leurs patients. 

Enfin, Angèle Lieby raconte une expérience spirituelle, au-delà du rationnel et du sensible, un voyage intérieur jusque-là inexplicable, qui nous fait beaucoup réfléchir sur les relations entre le corps et l’esprit. 

Finalement, ce qui la sauve : une larme qui coule, preuve qu’elle est vivante et qu’elle ressent des émotions. J’ai été particulièrement émue par le soutien indéfectible de sa famille et de ses proches, seuls socles solides qui permettent de s’en sortir. 


Un témoignage bouleversant sur ce qu’a vécu Angèle Lieby, plongée artificiellement dans le coma. Un récit fort, touchant, qui nous fait réfléchir sur la dissociation entre le corps et l’esprit.

Ma note : 7/10

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ISBN : ‎ 978-2-266-23366-8

Vie et mort d’un soldat d’élite : Maxime Blasco


Vie et mort d’un soldat d’élite : Maxime Blasco
de Dorothée Olliéric
197 pages, éditions Litos, à 6,90€


Résumé : Maxime Blasco a trouvé la mort le 24 septembre 2021. 52e soldat français tué au combat contre les djihadistes du Mali, il avait 34 ans. Maxime Blasco s’était illustré plusieurs fois en opex, mais il réfutait le qualificatif de héros. Il se voulait simple soldat, servant son pays. Un hommage national lui a été rendu aux Invalides, au cours duquel il a été fait officier de la Légion d’honneur.Dans ce récit bouleversant, Dorothée Olliéric revient sur la vie de ce tireur d’élite, ancien pâtissier qui avait choisi l’armée, et plus particulièrement les chasseurs alpins. Grâce aux témoignages des compagnons d’armes de Maxime, mais aussi de ses parents et de sa compagne, elle trace au plus près le portrait intime d’un homme engagé, qu’elle avait pu rencontrer et interroger lorsqu’il avait sauvé en 2019, sous le feu de l’ennemi, deux camarades après le crash de leur hélicoptère dans le désert du Sahel.Un an après sa disparition, nulle mieux que Dorothée Olliéric ne pouvait raconter, et donner à lire, le destin fulgurant et tragique de ce soldat exceptionnel qui était au coeur de son documentaire : Nuit d’enfer.


Extraits : « Tu as aimé ton métier, passionnément… Mais tu es mort le 24 septembre 2021 au Mali, l’œil dans le viseur face à ce combattant qui, ce jour-là, a été plus fort que toi. »

« Quatre mois peut-être pour tirer un trait sur une longue présence militaire, avec des succès tactiques, des chefs djihadistes éliminés, des centaines de combattants tués, des tonnes d’armes saisies. Mais le départ a un goût amer. Cinquante-trois militaires français sont morts au Mali, dont Maxime Blasco. »


Mon avis : Maxime Blasco… ce nom ne vous est peut-être pas inconnu. Ce héros des temps modernes est avant tout un soldat tireur d’élite, qui s’est illustré au cours de plusieurs opérations extérieures dangereuses en Afrique, dont la dernière au Mali, où il y a laissé sa vie, le 24 septembre 2021. Dorothée Olliéric, journaliste et grand reporter française, a rencontré Maxime Blasco lors d’un reportage face caméra, où il expliquait un sauvetage héroïque réalisé après le crash de l’hélicoptère dans lequel il était. Aujourd’hui, elle s’est fait un devoir de rendre hommage à ce soldat d’exception, dans un recueil documentaire, où se mêlent éléments biographiques et témoignages de ses proches. 

Je pense que toutes les personnes qui ont lues ce livre se sont ensuite (ou pendant leur lecture) précipitées pour aller visionner le reportage témoignage de l’auteure avec Maxime Blasco sur le sauvetage de ces coéquipiers, qu’elle explique longuement dans son récit. Pouvoir mettre une voix, des paroles, un visage sur un nom est primordial. Comme il est si longuement décrit dans ce livre, Maxime Blasco fait preuve d’une modestie sans pareil. Il est extrêmement humble vis-à-vis de son geste héroïque et n’apprécie pas forcément ce qualificatif de « héros » qui pourtant lui revient de droit.

J’ai beaucoup apprécié l’humanité qui transparaît de ce soldat d’élite, tout comme sa fraternité et s loyauté qui sont des traits de caractère indispensables pour être un bon militaire. Assurément, Maxime Blasco l’était. 

Maxime Blasco laisse derrière lui deux parents meurtris d’avoir perdu un fils, deux soeurs, une femme et un petit garçon. Tous ont acceptés de témoigner dans ce livre, d’ouvrir leur coeur, d’exprimer publiquement leur souffrance pour rendre un dernier hommage à celui qui avait une place si particulière dans leur vie. Entre pudeur et admiration, ils dressent le portrait de cet homme qui comptait pour eux, en mentionnant des anecdotes qui font sourire, pleurer, parfois rire. Des mots justes, emplis de bienveillance et de douceur, qui nous percutent et nous bouleversent.

Maxime Blasco, sa femme Alexandra et leur fils Ethan

Outre l’hommage adressé à Maxime Blasco, Dorothée Olliéric tenait à saluer la mémoire de tous les soldats morts pour la France, dont les 58 soldats qui ont laissé leur vie au Sahel, et tous les autres qui ont péri au cours d’autres opérations françaises. À l’heure où les troupes françaises ont déserté le Mali, se pose la question politique de comprendre si leur sacrifice a été bénéfique pour la France. Dans tous les cas, leur courage est admirable et restera à jamais gravé dans les esprits et les coeurs des français. 

Je regrette néanmoins l’absence de photos, comme il peut y en avoir dans le grand format. Dorothée Olliéric aurait au moins pu modifier ces passages où elle promet un album photos souvenir qui n’existe pas dans ce format poche : c’est dommage ! Malgré l’absence de photos, c’est avec le coeur lourd et les larmes au bord des yeux que l’on referme la dernière page de ce récit, 


Un magnifique récit intimiste truffé de témoignages, qui rend un vibrant hommage à Maxime Blasco, ce tireur d’élite d’exception, mort pour la France au Mali en septembre 2021. Bouleversant !

Ma note : 8/10

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ISBN : ‎ 978-2-38506-065-7

Où vont les larmes quand elles sèchent


Où vont les larmes quand elles sèchent
de Baptiste Beaulieu
271 pages, éditions L’iconoclaste, à 20,90€


Résumé : Jean a trente-six ans. Il fume trop, mâche des chewing-gums à la menthe et fait ses visites de médecin de famille à vélo. Il a supprimé son numéro de portable sur ses ordonnances. Son cabinet médical n’a plus de site Internet. Il a trop de patients : jusqu’au soir, ils débordent de la salle d’attente, dans le couloir, sur le patio. Tous les jours, Jean entend des histoires. Parfois il les lit directement sur le corps des malades. Il lui arrive de se mettre en colère. Mais il ne pleure jamais. Ses larmes sont coincées dans sa gorge. Il ne sait plus comment pleurer depuis cette nuit où il lui a manqué six minutes.


Extraits : « Faut vraiment rêver petit quand on est sur Terre : on minimise les risques d’être déçu. »

« Et si on se trompait tous ? Et si on confondait le fait d’être heureux avec le fait d’être momentanément distrait de notre chagrin quotidien ? »


Mon avis : Baptiste Beaulieu est un médecin qui incarne son propre rôle dans Où vont les larmes quand elles sèchent. D’abord interne dans un CHU, il assiste à une scène avec un enfant qui décède qui le hantera pendant des jours, des mois, voire des années. Suite à cet épisode traumatisant, il devient médecin généraliste. Sous forme de journal intime ou de journal de bord, il nous confie certaines anecdotes plus ou moins humoristiques sur des patients de son cabinet qu’il a réellement côtoyé et sur sa vie de médecin et d’homme. 

L’auteur pointe du doigt les difficultés du corps médical, qui doit faire face à des situations complexes : peu de moyens, déficit de personnel, désert médical. Ils sont pourtant au premier plan, face à des scènes choquantes, parfois dangereuses, ils doivent gérer la misère sociale, se montrer suffisamment pédagogue, à l’écoute, ouvert d’esprit… le tout, dans le respect du secret médical. On ressent aisément l’ambivalence de ton de Baptiste Beaulieu, tantôt agacé ou en colère, mais sans jamais l’exprimer face à un patient. Au contraire, il se montre doux, compatissant, très humain, il se met au niveau de chacun, sans jamais juger personne : une attitude digne de celle qu’on attend d’un bon médecin généraliste.

Le grand problème de l’auteur, c’est qu’il ne semble plus ressentir quoique ce soit face au malheur : impossible pour lui de pleurer. Une situation incongrue qui le hante quotidiennement. Finalement, on s’habitue peut-être à tout, même au plus tragique… En tout cas, cette thématique est centrale dans ce roman et revient fréquemment nous heurter, nous poussant à réfléchir sur la vie, la mort et le sens de l’existence. À l’image du problème existentiel de Baptiste, nul émotion ne transperce les pages : on reste assez stoïque face à tous ces problèmes qui pourtant, se déroulent bien sous nos yeux.

Mais au delà du médecin, il y a l’homme. Et l’homme déteste les injustices, l’homme ne tolère pas les violences faites aux femmes, l’homme fustige vivement les abus sur les enfants et prend partie pour les minorités écrasées par la société. Il est engagé et assume parfaitement ses convictions. J’ai apprécié les prises de positions. Néanmoins, j’ai trouvé l’ensemble assez nombriliste et parfois redondant. 


Un roman rempli d’humanité, qui raconte avec humour les difficultés rencontrées par un médecin généraliste. Un texte fort, engagé, qui nous fait réfléchir sur la vie et la mort et nous fait prendre conscience de la chance que l’on a. Très sympa sur le moment, mais vite oublié !

Ma note : 6/10

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ISBN : ‎ 978-2-37880-382-7

L’enfant du volcan


L’enfant du volcan de Ghyslène et Léo Marin 350 pages, éditions Albin Michel, à 20,90€


Résumé : Saint-Avre, village de la Creuse vidé par l’exode rural. Le château, devenu un orphelinat, vient d’accueillir des enfants d’ailleurs, dont Mila, une petite Réunionnaise, arrachée à son île et à sa famille. La fillette trouve auprès d’Ernestine et d’Hector, les épiciers du village, un peu de réconfort. Or, l’attachement profond qui se crée entre ce couple sans enfant mais débordant d’amour et cette gamine livrée à la solitude et au racisme semble contrarier les autorités administratives… Avec son fils Léo, Ghyslène Marin, puisant aux sources de son propre passé, signe un roman où la fiction se mêle à l’histoire. Au-delà de la grande sensibilité avec laquelle il décrit le lien qui se crée entre des êtres blessés, L’Enfant du volcan donne chair à cet invraisemblable drame vécu par des milliers d’enfants déplacés entre 1962 et 1984 vers des communes dépeuplées de la métropole, dans une totale indifférence.


Extraits : « La vie des morts n’appartient pas aux morts, elle appartient aux vivants. » « Quand on a une famille, on construit des châteaux de sable. Quand on n’a pas de famille, on croit vivre dans un désert. »

Mon avis : L’enfant du volcan est un livre dans lequel la fiction côtoie la réalité. Pendant près de 20 ans, de 1963 à 1981, des milliers d’enfants sont arrachés à leur terre natale de La Réunion et à leur famille pour repeupler des zones désertiques dans les campagnes françaises. Un scandale d’état qui a éclaté bien plus tard, puisqu’il aura fallu près de 20 ans encore avant que les premières contestations naissent de la part des familles bafouées.

Ici, à Saint-Avre, petit village de 800 habitants dans la Creuse, le château municipal, devenu orphelinat, accueille des centaines d’enfants réunionnais, déracinés et séparés de force de leur famille. C’est dans ce village que vivent Ernestine et son mari Hector, un couple vieillissant, sans histoire, mais parfois moqués, du fait de l’étrangeté d’Hector, que les autres habitants ne considèrent pas comme normal. Ernestine tient l’épicerie du village et a le bonheur de voir quotidiennement la petite Mila passer dans sa boutique. Une bouffée de fraîcheur, de gaieté et de bonne humeur, qui vient mettre de la joie dans la vie de cette petite mamie, qui n’a jamais pu avoir d’enfant. Les jours passant, le couple s’attache davantage à cette petite fille, qu’ils invitent fréquemment à passer le week-end loin de l’orphelin, dans leur maison douillette. Un havre de paix pour elle, qui n’a jamais connu l’amour familial.

Mila détient un sacré caractère. Elle a un tempérament de feu, elle est dynamique, enjouée, honnête, parfois directive, mais très attachante. C’est une personnalité qu’elle s’est forgée seule à l’orphelinat, alors qu’elle se retrouve entourée d’enfants dans le même cas qu’elle, sans attaches familiales, obligés de se conforter aux règles strictes imposées par les sœurs, directrices de l’établissement. J’ai été émue par cette jeune fille, si fragile mais pourtant si forte. Son histoire est à l’image des milliers d’autres, qui n’ont pas pu avoir une enfance décente, en raison de la migration forcée imposée à leurs familles. Chaque famille pensait donner des conditions de vie plus clémentes à leurs progénitures, d’autres signaient les documents sans même les lire, parfois en raison de la peur, parfois par manque d’éducation. Bien que le scandale ait éclaté et que les tords tentent d’être réparés, il est essentiel de mettre en lumière cet épisode dramatique, pour montrer tout le tragique de cette histoire : le racisme subi par les enfants déplacés, la méchanceté, la discrimination à leur égard, leur perte totale d’identité et de repères. Autant de faits marquants qui les empêcheront certainement de se construire convenablement.

Malgré tout l’intérêt que j’éprouve pour cette histoire, j’ai trouvé qu’il y avait un fossé entre le fond – le contexte global, les faits historiques alliés à la fiction – et la forme – comment tout ça est décrit. Bien malgré moi, j’ai parfois ressenti de la lassitude et un peu d’ennui en lisant ce livre, non pas à cause de l’histoire, mais plutôt de la façon dont elle était écrite. J’aurais sans doute aimé plus de dynamisme, une écriture moins pesante, plus aérée et aérienne. 


Une histoire émouvante sur les milliers d’enfants réunionnais déportés en France pour repeupler les campagnes. Un habile mélange de fiction et de réalité, pour mettre en lumière cet épisode dramatique de l’histoire de notre pays et les conséquences directes et indirectes engendrées pour les enfants et leurs familles.

Ma note : 6,5/10

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ISBN : ‎ 978-2-226476746