20 pieds sous terre


20 pieds sous terre de Charlotte Erlih
230 pages, éditions Gallimard jeunesse


Résumé : Un coup de téléphone et la vie de Manon bascule. Son frère Théo est mort électrocuté par le troisième rail du métro parisien. Au-delà de la douleur, une foule de questions reste en suspens. Que faisait Théo en pleine nuit dans le tunnel reliant les stations Père Lachaise et Gambetta ? Quelle double existence menait-il ? Terrible accident ou crime sordide ? Une enquête souterraine dans le dédale du métro parisien et le monde clandestin du graf.


Extraits : « Ne pas penser à cela. Se concentrer sur des choses simples : sortir une casserole, faire chauffer de l’eau, sortir une deuxième casserole, faire chauffer de la soupe, ajouter du sel dans l’eau qui bout, doser les spaghettis pour cinq. Au moment de les plonger dans la casserole, Manon se rend compte qui’l n’y en a plus besoin d’autant. Que désormais il faudra qu’elle apprenne à doser la nourriture pour quatre. Perversité de la douleur, qui se loge dans les détails les plus anodins du quotidien… »

« C’est le risque, faut l’assumer, argue crânement Sekkou. Si tu veux vraiment vivre, faut être prêt à mourir. Sinon, tu végètes comme les automates qu’on voit partout à Paname, avec leurs tafs de merde, leurs apparts Ikea tous pareils, leurs lifes bien réglées, leurs bitures minables du week-end, leurs caméras de surveillance… »


Mon avis : Le lecteur est plongé in medias res dans le coeur du sujet : en pleine nuit, on apprend, en même temps que Manon, que son frère Théo est mort, électrocuté par le troisième rail du métro. Un drame pour ses parents, qui apprennent en même temps la passion cachée de leur fils : taguer les murs du métro parisien en pleine nuit. Les gendarmes concluent à un accident, mais Manon est certaine que son frère, de nature bien trop prudent, s’est fait pousser sur les voies. Obstinée et incapable de faire son deuil, elle décide de poursuivre l’enquête avortée par la police et se rend elle-même dans le métro, au contact des tagueurs de la nuit. Un monde obscur, caché et dangereux.

Charlotte Erlih nous emporte dans un monde inconnu : les tréfonds des rames de métro. Aux côtés de Manon et des jeunes tagueurs, on déambule entre les stations parisiennes, on découvre ce qui se cache entre les tunnels, on emprunte des passages secrets, on prend le temps de regarder les dessins qui ornent les murs et qui d’ordinaire, défilent sous nos yeux sans que l’on puisse les fixer. Mais le métro parisien n’est pas dénué de tout risque, puisque la tension électrique continue à circuler sur les rails, ce qui peut causer, comme dans le cas de Théo, une électrocution mortelle. Des patrouilleurs circulent également toute la nuit avec des chiens, pour repérer les vandales. J’ai beaucoup aimé découvrir ce monde de la nuit si intriguant. L’idée d’écrire sur ce sujet est originale, novatrice, devrais-je dire, puisque je n’avais jamais vu cette thématique abordée en littérature. En parallèle, des thématiques secondaires viennent s’ajouter à l’enquête initiale : l’amour fraternel, l’homosexualité… L’amour qui unie Manon à son frère est puissant, très émouvant. Elle est prête à tout les danger pour venger sa mort et apporter une paix durable à sa famille. En parallèle, Léa, le troisième enfant de la fratrie semble effacée, en retrait de cette enquête qu’elle considère comme futile. Il y a donc un fossé entre la réaction des deux soeurs : l’une est touchée, emphatique, en colère ; tandis que l’autre est attristée mais résignée.

Bien que j’ai apprécié l’histoire, j’ai trouvé que certaines scènes étaient un peu trop superficielles, très éloignées de la réalité. Manon se déplace seule en pleine nuit, elle n’a pas peur de se rapprocher de groupes de tagueurs réputés comme dangereux ; elle leur débite des mensonges pour descendre avec eux qui sont loin d’être plausibles et qui pourtant fonctionnent… c’est trop simple et peu crédible. C’est ce que je reproche dans l’ensemble à cette histoire : elle est bien, intéressante et originale, mais un peu bâclée, trop simplifiée, tout se déroule trop facilement. Il est peu vraisemblable qu’une jeune fille puisse mener à terme une enquête seule puis dévoiler ses réponses à la police aussi naturellement. Dans la vraie vie, on a jamais vu ça !


Un récit peut-être un peu trop court, mais original, moderne et dynamique, qui nous plonge dans les tréfonds des métros parisiens en pleine nuit. J’ai apprécié l’histoire globale, bien que les quelques invraisemblances de situation m’ont passablement gênées.

Ma note : 6/10

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ISBN : 978-2-07-516858-8