La maison Chapelier, livre 2


La maison Chapelier, livre 2 de Tamzin Merchant
425 pages, éditions Gallimard jeunesse, à 18€


Résumé : ARTISANS, SOYEZ FRÈRES, QUE LA MAGIE OPÈRE !
Toutes les nuits, Cordelia parcourt les rues de Londres en quête d’indices pour retrouver la trace de son père. Elle découvre alors la ville en proie à la plus terrible des menaces : la magie est en train de disparaître ! Pour la préserver, Cordelia doit relever un défi impossible : créer une alliance entre toutes les familles d’artisans, qui depuis des générations se détestent copieusement.
Une héroïne intrépide, une carte mystérieuse, des secrets de famille et des tempêtes magiques : la suite des aventures enchantées et merveilleusement loufoques de Cordelia Chapelier.


Extraits : « Apprendre à lire, c’est comme apprendre à allumer un feu : la lecture éclaire le chemin dans la vie. »

« Tu sais, si on n’a pas peur, on ne peut pas être courageux. »


Mon avis : J’ai eu la chance de pouvoir lire la suite de La maison Chapelier, une saga jeunesse fantastique dont j’avais adoré le premier tome en mars 2022. Je retrouve avec grand plaisir la petite Cordelia Chapelier, descendante d’une famille de magiciens, qui confectionne des chapeaux sur-mesure aux pouvoirs extraordinaires. Toujours à la recherche de son père disparu en mer, Cordelia doit également combattre un être maléfique, prêt à tout pour détruire tout substitut de magie présent dans ce monde onirique.

Mon avis global sur ce deuxième tome reste identique au premier, c’est-à-dire que j’ai grandement apprécié le livre-objet avec sa couverture colorée et scintillante, ainsi que les illustrations en noir et blanc qui ponctuent le récit, en revanche, j’aurais été d’autant plus contente si elles avaient été réalisées en couleurs… sans doute une question de coût !

Tout comme dans le tome 1, j’ai beaucoup aimé le personnage de Cordelia. C’est une jeune fille dynamique, mature, censée et réfléchie, qui ne se met pas forcément en avant, mais qui dispose de qualités de meneuse indéniables. Je salue surtout sa fidélité et sa confiance envers ses amis, Lulu et Sam, ainsi que son courage et son ouverture d’esprit, notamment dans le rapprochement qu’elle souhaite voir s’opérer entre les différentes familles d’artisans. Cordelia est sans conteste une jeune fille bonne, généreuse et gentille.

Concernant l’intrigue en elle-même, elle est dans la continuité du premier tome, avec un enchaînement dynamique des scènes, des rebondissements inattendus, qui rendent le rythme légèrement plus soutenu que dans le tome 1. La magie est présente, elle alimente ponctuellement l’histoire sans pour autant prendre une place prépondérante dans celle-ci, elle est proprement dosée. La magie noire est surtout représentée, avec des scènes de destruction qui frisent l’apocalypse et l’apparition d’un monstre mythologique redoutable, la harpie, constituée d’un corps de vautour et d’une tête de femme. Mandatée par le méchant pour stopper la progression de Cordelia et de ses amis dans leurs recherches, elle fait régner la terreur dans la ville. La seule manière de les contrer, serait d’unir l’ensemble des forces magiques des artisans pour détruire toute la magie noire. Un projet ambitieux pour Cordelia, puisque les familles des artisans se font la guerre depuis de nombreuses années. Mais rien n’est trop dure pour notre téméraire protagoniste !


Un deuxième tome à la hauteur du premier, qui mêle habilement magie, mystère et action. J’ai hâte de pouvoir lire la suite de cette superbe saga jeunesse.

Ma note : 8/10

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ISBN : 978-2-07-515739-1
Traduction : Marie Leymarie

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L’année de grâce


L’année de grâce de Kim Liggett
467 pages, éditions Gallimard jeunesse, collection Pôle Fiction, à 8,70€


Résumé : Celles qui survivront ne seront plus jamais les mêmes.
« Personne ne parle de l’année de grâce. C’est interdit.
Nous aurions soi-disant le pouvoir d’attirer les hommes et de rendre les épouses folles de jalousie. Notre peau dégagerait l’essence pure de la jeune fille, de la femme en devenir. C’est pourquoi nous sommes bannies l’année de nos seize ans : notre magie doit se dissiper dans la nature afin que nous puissions réintégrer la communauté.
Pourtant, je ne me sens pas magique.
Ni puissante. »
Un an d’exil en forêt.
Un an d’épreuves.
On ne revient pas indemne de l’année de grâce.
Si on en revient.


Extraits : « Le mariage n’a rien d’un privilège à mes yeux. Le confort n’apporte pas la liberté ; ses chaînes moelleuses seront toujours des chaînes. »

« Elles appellent cela de la magie.
Moi, j’appelle cela de la folie. »


Mon avis : Quelle claque ! J’ai été charmée par cette dystopie enivrante, à l’histoire originale et particulièrement passionnante. Le prodige est encore plus louable lorsque l’on sait que L’année de grâce est le premier roman de Kim Liggett.

Tierney est une jeune adolescente qui entre dans son année de grâce. Chaque année, pendant un an, des jeunes filles sont obligées de se retirer dans un camp excentré au fin fond de la forêt et de vivre dans des conditions précaires dans le but de retirer toute la magie qui sommeille en elles. A l’issue, toutes celles qui auront surmonté ces épreuves pourront retourner au comté, épouser leurs promis pour celles qui ont été choisies, ou partir travailler pour les autres.

Cette dystopie est extrêmement bien amenée, puisqu’elle permet de pointer du doigt insidieusement des pratiques fâcheuses et de dénoncer une société parfois un peu trop branlante. Ici, les femmes sont clairement asservies et désignées comme le sexe faible. Elles existent et vivent uniquement pour procréer et servir d’esclaves aux hommes. Elles sont choisies par un mari qu’elles n’ont pas voulu, elles sont privées d’éducation, elles doivent se plier aux règles exigées par leurs pères et par le comté, sans jamais avoir leur mot à dire sur les décisions qui sont prises. Enfin, traitées comme des hérésies par des fanatiques religieux, une véritable chasse aux sorcières est mise en place, comme au temps de l’Inquisition. Elles doivent fuir les braconniers, qui attendent patiemment de les capturer pour récupérer leurs organes, soi-disant aphrodisiaques et pleins de vertus.

Tierney, surnommée « Tierney la Terrible » est une femme avant-gardiste et clairvoyante vis-à-vis de la situation dans laquelle elle est. Elle ne croit pas aux histoires de magie et entend convaincre les autres filles du groupe qu’elles ne doivent pas croit tout ce qu’on leur raconte. Malheureusement, instrumentalisées depuis leur plus jeune âge, il est difficile de les convaincre du contraire.

L’année de grâce est un roman assez noir, où la violence est souvent présente. Les tensions apparaissent et s’accentuent entre le groupe de filles, à coup de harcèlement physique et verbal ou de jalousie. Coupées de tout contact avec le reste du monde et en particulier avec le sexe masculin, dit le sexe fort, elles doivent se débrouiller seule pour survivre. Aussi, elles mettent en place des règles absurdes, celles-là même qu’on leur a enseignées depuis leur plus jeune âge et n’hésitent pas à rabaisser, torturer et s’opposer les unes aux autres au lieu de s’entraider. J’ai parfois été touchée et en colère devant le comportement de certaines filles devant d’autres plus faibles, sans voir jamais apparaître ne serait-ce qu’un semblant d’humanité, ou de cœur, tout simplement. Moquées sur leur physique, mise intentionnellement à l’écart, victimes de chantage pour intégrer le groupe… c’est ce qui s’apparente au harcèlement du XXIème siècle, celui dont on entend tant parler dans les médias et qui accroît de jour en jour.

Seules lumières d’espoir dans ce monde bien noir : les fleurs, qui éclosent à intervalles réguliers et contribuent à apporter des messages forts à qui saura les déchiffrer. L’amour apporte également un semblant de luminosité parmi toute cette cruauté. Avant son départ, pendant la cérémonie des voiles, Tierney a été choisie comme femme par son meilleur ami, Michael, alors qu’elle ne le souhaitait pas. Autonome, mais surtout fière d’être libre, de pouvoir décider de sa vie, de son corps et de son destin, elle ne souhaitait pas appartenir à un homme, quel qu’il fût. Enfin, une histoire d’amour inattendue mais particulièrement romantique naîtra sous nos yeux de lecteurs émus.

Beaucoup assimilent ce livre à La servante écarlate de Margaret Atwood, qui dépeint un monde gouverné par des fanatiques religieux dans lequel les femmes sont devenues des esclaves, obligées de procréer sous peine de mourir. La servante écarlate, tout comme L’année de grâce, peuvent être décrits comme des romans féministes, qui nous amènent à réfléchir sur la place de la femme dans notre société, sur les liens qu’elles nouent entre elles ainsi que sur la liberté individuelle et collective qui nous est donnée.


Une dystopie féministe impactante et émouvante, qui nous propulse dans un univers inédit, où la violence côtoie l’amour, l’asservissement rencontre la liberté, le harcèlement fait front à l’entraide. Un roman qui donne à réfléchir sur la condition de la femme et sa place dans la société : j’ai adoré !

Ma note : 9/10

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ISBN : 978-2-07-516470-2
Traduction : Nathalie Peronny

Jefferson fait de son mieux


Jefferson fait de son mieux de Jean-Claude Mourlevat
293 pages, éditions Gallimard jeunesse


Résumé : Quatre ans après l’expédition Ballardeau, la vie a repris son cours pour Jefferson et Gilbert. Mais quand Simone, leur ancienne compagne de voyage, disparaît, le hérisson et le cochon se lancent sur les traces de la lapine dépressive. Les deux amis ne sont pas au bout de leurs surprises.


Extraits : « Cher Gilbert,
pour commencer, pardonnez mon petit mensonge : il n’y a rien à réparer dans ma maison. Pendant tout l’hiver, j’ai eu 19° dans le salon et 16° dans ma chambre, les radiateurs fonctionnent tous très bien. Ou plutôt si, il y a beaucoup à réparer chez moi, mais c’est un travail que le meilleur des chauffagistes ne peut pas faire. »

« Les mensonges, ça doit être comme Gilbert avec les bugnes, se dit-il, quand on commence on peut plus s’arrêter. »


Mon avis : Jefferson est un petit hérisson enquêteur qui a connu le succès dans un roman éponyme édité en 2018 par Gallimard jeunesse. Fort de ce premier succès, Jean-Claude Mourlevat, sans doute plébiscité par ses fans, plus ou moins jeunes, sort un second tome des aventures de Jefferson. Dans celui-ci, le hérisson, escorté par son ami Gilbert, un cochon, se lancent à la recherche de leur amie Simone, une lapine, qui a mystérieusement désertée sa maison, en laissant seulement une lettre d’adieu, truffée d’interrogations. Où a-t-elle pu aller ? Elle, pourtant si attachée à sa maison, pourquoi l’a-t-elle subitement désertée ?

Je n’ai pas lu le premier tome mais je vous confirme que celui-ci peut se lire indépendamment du premier. L’auteur nous embarque dans un monde où se côtoie d’un côté le pays des animaux et de l’autre le pays des humains. Un univers féerique, assez doux, rafraîchissant, dans lequel j’ai pénétré avec facilité et plaisir. 

Il faut dire que nos deux héros, Jefferson et Gilbert, aident à se sentir rapidement bien, puisqu’ils sont très attachants et particulièrement marrants. Pour aider leur amie Simone, qu’ils pensent en danger – sans pour autant que cette dernière ait pu le leur confirmer -, ils vont monter une expédition pour la sauver. Dans leur aventure déjantée, ils embarquent monsieur Hild, un vieillard veuf à la gentillesse démesurée, et le sévère Walter, un homme sûr de lui, arrogant, qui inspire la crainte et le respect. Cette joyeuse bande dépareillée va s’élancer en van aménagé au secours de la lapine en danger, sans vraiment savoir ce qui les attend. Ils vont notamment découvrir que le mal-être de Simone est bien plus psychique que physique : elle souffre de solitude, ce qui l’a faite tomber progressivement en dépression… un mal qui ronge des millions de personnes quotidiennement, que l’on ne perçoit pas souvent, mais qui fait de véritables dégâts. Il est important d’en parler, et ce dès le plus jeune âge, comme le fait brillamment Jean-Claude Mourlevat, dans un style qui fonctionne : avec humour et sensiblerie. 


Un roman jeunesse mi-polar/mi-fable, doté de belles valeurs, qui se déguste avec volupté et délicatesse. J’ai hâte de pouvoir suivre d’autres aventures de Jefferson et Gilbert, ces deux compères animaux si attachants !

Ma note : 7,5/10

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ISBN : 978-2-07-516977-6

L’honneur de Zakarya


L’honneur de Zakarya de Isabelle Pandazopoulos
258 pages, éditions Gallimard jeunesse, collection Scripto, à 13,50€


Résumé : Zakarya Benothmane, vingt ans, est accusé du meurtre de Paco Moreno, son rival au club de boxe. Tout est contre lui. Mais Zakarya affirme qu’il n’y est pour rien. Au cours de son procès, les témoignages se succèdent à la barre : Djibril, l’entraîneur, ses amis, la belle Aïssatou, Yasmine, sa mère, qui a élevé seule ce fils adoré et indomptable qu’elle défend comme une lionne…
À la défense, Lucie Colancelle, jeune avocate brillante et passionnée qui gagne peu à peu la confiance de ce garçon mystérieux. Mais si Zakarya est innocent, pourquoi reste-t-il muré dans son silence ?


Extrait : « C’est le moment du film que tu préfères.
Cette nuit que vous avez passée tous les deux dans un hall d’hôpital, peut-être pas la nuit mais au moins quelques heures, vous ne vous êtes rien dit, ou si peu, et ça continue de t’étonner alors qu’il te semble lui avoir confié dès les premiers instants de cette nuit-là ta vie entière, ça veut dire ton âme et ton corps et tant pis pour ceux que ça fait rire. Le savait-elle ? Le sentait-elle ? Elle n’a pas posé de questions, pas demandé pourquoi ni comment tu t’étais retrouvé là. »


Mon avis : J’écris cette chronique presque un mois après avoir terminé de lire L’honneur de Zakarya – faute de temps, vacances estivales obligent. Et fort m’est de constater que si je n’avais pas relu la quatrième de couverture de ce livre, je n’aurais plus eu aucun souvenir de l’histoire... ce qui est mauvais signe quand même. Je pense que cela est en partie dû au nombre de pages assez faibles : moins de 300, un court laps de temps de lecture qui ne permet pas de s’immerger totalement dans l’histoire, ni de s’attacher convenablement aux personnages.

Zakarya est un jeune homme de vingt ans, accusé du meurtre de son rival du club de boxe. Néanmoins, il clame corps et cris son innocence, même si tout l’accable. Son avocate, Léonie Colancelle, va tenter de gagner la confiance du garçon, afin d’en apprendre plus sur lui, son histoire, ses sentiments et ses motivations.

Chacun des livres de Isabelle Pandazopoulos traite de thématiques fortes, qui mettent très souvent en avant des jeunes en difficulté, qu’elle tente d’aider en faisant passer des messages ciblés, pleins d’espoirs et de positivisme. Il faut dire que l’auteure est toute légitime à écrire sur ces jeunes : professeure de lettres, elle a notamment enseigné en zone d’éducation prioritaire (ZEP) et auprès d’enfants en situation de handicap. Ici, Zakarya est un jeune homme difficile, en décrochage scolaire, constamment en proie à la violence et au trafic de drogue en raison de ses fréquentations peu recommandables. Il faut dire qu’il n’est pas issu d’un milieu aisé : élevé seul par sa mère Yasmine suite à l’abandon de son père (un homme marié), Yasmine a dû travailler d’arrache-pied pour subvenir aux besoins de son fils. Tout porte à croire que Zakarya est un homme peu recommandable, mais il est doté de deux visages. Le deuxième se matérialise lorsqu’il se trouve aux côtés d’Aïssatou, une jeune fille dont il tombe secrètement amoureux. Car leur amour est impossible : Aïssatou est aux prises de son grand frère radicalisé, qui exerce une pression sans commune mesure sur elle. On plonge directement dans un univers sombre, inquiétant, qui nous est totalement étranger, au sein duquel on se sent à l’étroit et mal à l’aise. 

Les chapitres alternent entre le procès de Zakarya et le déroulé complet de l’histoire passée. Au fur et à mesure, via des flashs-backs et des souvenirs épars, on en apprend plus sur ce garçon, qui nous apparaît bientôt comme un grand ours au coeur doux. En effet, ce héros mutique est devenu comme il est aujourd’hui à cause de son passé, de son enfance blessée, de la détresse, la pauvreté, la violence quotidienne. J’ai été émue par ce personnage, qui finalement se révèle tendre et bienveillant, même s’il ne laisse absolument rien paraître. J’ai également été dévastée par l’injustice sociale : en se basant uniquement sur des préjugés – raciales, sociales -, sans preuve concrète incriminante, ils accusent Zakarya d’un crime qu’il jure ne pas avoir commis. Même si certaines scènes du procès sont exagérées et manquent cruellement de réalisme, je pense sincèrement que certaines enquêtes peuvent être bâclées sous réserve que la personne incriminée porte sur sur elle tous les stigmates d’un criminel.


Un roman social intéressant, qui met en avant des thématiques fortes : l’injustice sociale, les préjugés, la construction identitaire… Un livre qui se lit rapidement mais s’oublie tout aussi rapidement. Des chapitres plus nombreux auraient été les bienvenus !

Ma note : 5/10

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ISBN : 978-2-07-516994-3

Les derniers des branleurs


Les derniers des branleurs de Vincent Mondiot
413 pages, éditions Gallimard jeunesse


Résumé : Pour Minh Tuan, Chloé et Gaspard, l’avenir se résume à la journée d’après. Les cours séchés, les joints partagés, les mangas lus dans la chambre de l’un, les jeux vidéo terminés dans la chambre de l’autre… Ils partagent tout, de leur désespoir tranquille à leur désintérêt absolu pour leur scolarité. Mais lorsque Tina, une jeune migrante bien plus sérieuse qu’eux, rentre dans l’équation, soudain, la possibilité de décrocher leur diplôme va devenir tangible pour ces trois branleurs autoproclamés. Mais en restant fidèles à leurs principes : le bac, ils ne l’auront pas en révisant…


Extraits : « Grandes bières : en avoir une à la main est une marque de reconnaissance entre âmes perdues. N’est étrangement pas vrai des bières de taille normale. »

« La vie, le monde, les gens, tout, ça rend triste, non ? C’est tous ceux qui vont bien qui ont un problème. Voire qui sont le problème. »


Mon avis : À quelques jours seulement du baccalauréat 2022, je suis l’actualité en lisant un roman à la thématique appropriée. Je découvre les portraits de quatre adolescents, surnommés « Les derniers des branleurs », puisque totalement passif en classe, préférant s’adonner à leurs loisirs plutôt que de réviser pour décrocher leur diplôme. Dans ce quatuor décadent, seule Tina, une réfugiée congolaise arrivée seule en France il y a quelques mois, se montre studieuse et concentrée. A côté, Minh Tuan, Gaspard et Chloé font figure de cancres. Les trois adolescents se saoulent sans vergogne, fument des joints sans se cacher, sèchent les cours où ils n’ont pas envie d’aller, sans pour autant que leurs parents s’inquiètent. Mais à quelques semaines seulement du bac, ils ont un élan de conscience : que vont-ils faire de leur vie ? La première étape, incontestablement, sera celle d’avoir ce fichu diplôme et de prouver à l’ensemble du lycée, du corps enseignant et de leurs proches, qu’ils ne sont pas seulement des branleurs.

Le titre peut certainement vous mettre la puce à l’oreille : Les derniers des branleurs a un vocabulaire cru, de jeunes, peuplé d’insultes, de familiarités et d’abréviations que l’on rencontre généralement peu dans les romans, même jeunesse. Ici, Vincent Mondiot a voulu s’adresser directement à ces jeunes souvent tête en l’air, qui prennent leur vie à la légère, se contentent du présent sans vraiment penser à leur avenir. C’est un livre insolent, dans lequel les 16-18 ans pourront facilement se reconnaître, puisque chacun passe inévitablement par une crise d’adolescence, où l’envie de tout envoyer balader devient très forte.

Mais derrière ces grossièretés se cache quand même un véritable message. Le but étant de faire prendre conscience aux jeunes qu’ils sont seuls maître de leur destin. C’est eux qui choisissent le sens à donner à leur vie. J’ai trouvé quand même particulièrement transparents les parents de ces adolescents, qui n’apparaissent à aucun moment. Je ne pense pas que cet aspect-ci reflète parfaitement la réalité… à moins qu’ils aient décidé depuis un certain temps de jeter l’éponge avec leurs enfants, voyant leurs efforts rester vains. Le fait est que, même si chacun doit décider de son avenir, il faut prendre conscience que plusieurs aides extérieures sont précieuses : les parents d’abord, qui prodiguent des conseils avisés, mais aussi les enseignants, qui ne sont pas uniquement là pour faire apprendre des leçons et donner des notes aux élèves, mais surtout pour les aiguiller sur leur avenir.

En définitive, ce livre prodigue peut-être un bon message de fond, mais il est enfoui sous une quantité de mauvais messages. Il est certain que lorsque j’aurais des enfants, même adolescents, je doute de leur donner spontanément cette histoire à lire. C’est vulgaire, avilissant, ça peut donner de mauvaises idées aux jeunes – sécher les cours, boire, fumer, tricher, insulter, manquer de respect à ses professeurs ou ses camarades… mais on doit avouer, malheureusement, que ça se rapproche bien trop cruellement de la réalité des faits.

Avant de clore cette chronique, je souhaitais adresser une mention spéciale pour les notes de bas de page rajoutées par l’auteur, qui sont à l’image du récit : décalées et bien marrantes. C’est l’une des rares fois où je lis ces petites notes et où j’y prends du plaisir. 


Un roman jeunesse assez grossier, à ne pas mettre entre toutes les mains, qui comporte néanmoins des messages optimistes et pleins d’espoirs : nous sommes seuls maîtres de nos destins. sympa, marrant, mais cru. 

Ma note : 7/10

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ISBN : 978-2330136963