Le seul truc qui leur a cassé les yeucs, ce sont les barrettes qu’on trimballait sur nous. Mais comme j’ai dit : on débarque au Bois, on planque le matos, on bicrave quelques morceaux et on tise tranquille. Les potos me font confiance depuis le bahut, ils savent qui est le boss et qui prend les initiatives. Je n’ai pas l’habitude de proposer des plans foireux, les srabs me connaissent, on a tous poussé dans le même tièque. »
Ainsi commencent les confessions du Boss, dealer officiel des prostitués(es) transsexuel(le)s, des michetons et vagabonds du Bois de Boulogne et des environs. À la tête du BDB-crew, une équipe organisée, constituée entre autres de Youssouf et Vamp ses fidèles lieutenants, Souleymane et Makita les mecs hardcore, Miki et Ahmé les jeunes guetteurs, le Boss s’impose comme le maître des lieux, pulvérise ses concurrents, s’éloigne de Smoke l’ancien grossiste du quartier et nargue Philippe, le condé.
Le business fait florès jusqu’au jour où Paola, un trans brésilien, véritable star du Bois, se fait assassiner. La police quadrille alors tout le secteur. Mauvais pour les affaires. D’autant que ce meurtre n’est que le premier d’une longue série.
Ici, Johanna Zarca nous présente un lieu nationalement connu de son fameux nom qui effraie (ou qui passionne, tout dépend) : Le bois de Boulogne, situé au nord ouest de la capitale française. Cette forêt est la place emblématique de la prostitution parisienne : hétérosexuelles, homosexuelles ou transsexuelles, tout y passe. L’auteure choisit de nous présenter cette ambiance-là, dans des narrations écrites en argot, et dont l’histoire se déroule essentiellement en pleine nuit.
Ce manque de luminosité ajoute du mystère au lieu, et beaucoup de terreur. Déjà amplement évité par beaucoup, ce lieu est peuplé de drogués, racailles et dealers qui s’ajoutent au réseau de prostitution nocturnes cité ci-dessus. Le peu de lumière qui perce à travers ce roman peut aussi faire référence au peu d’avenir, de bonheur et de couleur qui traverse la vie des personnages. Condamnés à vivre tels des vagabonds, en marge de la société, rejetés et mal vus par tous, ils se murent dans un espace étroit et se cantonne à leur plaisir personnel, sans prendre en compte le conformisme qu’érige les lois.
Plongé en pleins coeur de ce trafic nocturne, nous nous coulons dans la peau d’un des dealers les plus effrayants du circuit, qui fait la loi dans le secteur : Le Boss de Boubou. Rien n’est plus déroutant que de s’approprier ses sentiments, ses ressentis et d’admirer ses réactions. Cet être humain n’a rien d’humain, hormis les attributs qui lui sont propres. Ce lieu est tellement hors norme, coupé de la civilisation, qu’il en vient à déshumaniser littéralement les gens qui le fréquentent.
L’écriture n’a rien de poétique, rien de littéraire. Ça été un vrai conflit intérieur que de lire de l’argot intraduisible, incompréhensible et vulgaire à souhait. Quel gâchis pour cette si belle langue française… surtout quand on pense que de réelles personnes emploient ce genre de vocabulaire ! Les insultes fusent, notamment envers les forces de l’ordre, ce qui renforce le mépris que j’entretiens envers les protagonistes du roman.
Néanmoins, le seul avantage que je pourrais trouver à ce genre d’écriture, c’est la facilité d’immersion dans le milieu choisi. Pour se sentir au centre du Bois de Boulogne, pour sûr, nous y étions, et bien dedans !
Je n’ai pris aucun plaisir particulier à découvrir ce livre. L’intrigue (si intrigue il y avait… en tout cas, je n’en ai pas perçu), tardé à arriver, les anecdotes se succédaient sans pour autant être le point culminant de l’histoire. J’ai lâché ma lecture au bout du tiers du livre, n’en pouvant plus de ce trop-plein de kaïds, de ce milieu malveillant, envers qui j’ai ressenti une profonde haine.
Info ou intox, si l’auteur a réellement vécu ce genre d’événements, il essaie aujourd’hui d’expliquer les raisons de son choix, en peignant son intimité au travers de son héros, ou voulant tout simplement continuer de rompre les règles en posant sur papier une expérience hors du commun… Soit on aimer, soit on déteste… Pour ma part, ça ne passe pas ! L’idée était quand même bien bonne et m’a permise de pénétrer dans le sanctuaire sacrée de la prostitution, dans ce lieu tu de tous, qui fascine autant qu’il terrifie. Attention aux âmes sensibles, ce roman est chargé d’un vocabulaire obscène à la limite du hardcore.
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