246 pages, éditions Folio
Allégorie des idéologies de masse, le rhinocéros, cruel et dévastateur, ne se déplace qu’en groupe et gagne du terrain à une vitesse vertigineuse. Seul et sans trop savoir pourquoi, Bérenger résiste à la mutation. Il résiste pour notre plus grande délectation, car sa lutte désespérée donne lieu à des caricatures savoureuses, à des variations de tons et de genres audacieuses et anticonformistes. La sclérose intellectuelle, l’incommunicabilité et la perversion du langage engendrent des situations tellement tragiques qu’elles en deviennent comiques, tellement grotesques qu’elles ne peuvent être que dramatiques.
« La vie est une lutte, c’est lâche de ne pas combattre ! »
Cette pièce de théâtre classique, qui s’inscrit dans le courant littéraire de l’absurde, est fluide et extrêmement facile à lire. Rhinocéros se divise en trois actes, ayant chacun des décors différents, et comporte pas mal de personnages, qui sont très faciles à mémoriser.
Tout débute lorsque, sur la place du village, un barrissement et deux rhinocéros déboulent et passent simultanément devant le regards des villageois, ébahis. D’où viennent-ils ? où vont-ils ? qui sont-ils ? Des questions qui font polémiques, et qui vont déclencher un énorme débat. Eugène Ionesco va prendre pour cible Hitler et sa façon de gouverner, pour en faire l’allégorie des rhinocéros.
Les personnages sont très variés, et horriblement attachants. Sur les questions énoncées précédemment, chacun avaient sa propre façon de penser et son avis. Ils ne se laissaient pas influencer, avaient un bon sens critique, mais étaient très butés.
Rhinocéros est également une pièce comique, où l’humour est au centre de toutes les discussions. Les dialogues semblent tellement paradoxales, distants, et étranges que ça en devient comique. De plus, les situations dans lesquelles les personnages se retrouvent ne peuvent qu’amplifier cette comédie.
Mais Eugène Ionesco sait faire la part des choses, et c’est avec une grande maîtrise qu’il arrive à combiner la comédie et le registre didactique.
Les rhinocéros n’ont pas été choisis par hasard. L’auteur a choisi des animaux fort, féroces et se déplaçant en troupe… une parfois allégorie des troupes nazis. Cette épidémie de rhinocérite qui augmente est en fait la dictature Hitlérienne grandissante. Un fort message est camouflé derrière ce style comique.
Loufoque, décalé mais néanmoins bien pensé et intelligemment écrit, j’ai pris un grand plaisir à lire Rhinocéros.
2 réflexions sur “Rhinocéros”